Emploi
Un document d'évaluation que l’Opinion a pu consulter montre que les allocataires du RSA qui expérimentent la réforme sont globalement satisfaits et leur taux d’accès à l’emploi sont encourageants au bout d’un an, même si le quota de quinze heures d’activité est rempli de manière inégale
L'Opinion- 8 novembre 2024 - Par Sarah Spitz
Plus que 55 jours avant la généralisation de la réforme du RSA. Aujourd’hui expérimentée dans 47 territoires de France, elle entamera sa montée en charge – progressive – dans les deux prochaines années. Qu’ont donné les premières expérimentations ? Le 7 novembre, le ministère du Travail a présenté un bilan à date dans un document que l’Opinion a pu consulter. Pour la première fois, un bilan chiffré d’un an de test a pu être réalisé sur la base d’une première vague d’expérimentations.
Pour rappel, la loi « pour le plein-emploi », promulguée en décembre dernier, prévoit d’inscrire tous les allocataires du RSA, à terme, à France Travail, successeur de Pôle emploi. Une fois inscrits, ils bénéficient d’un « accompagnement rénové », avec le suivi par un binôme constitué d’un conseiller France Travail et d’un conseiller du département, reposant sur « au moins quinze heures » d’activités par semaine. Celles-ci feront partie d’un contrat d’engagement qui conditionnera le versement du RSA.
En tout, en octobre, un peu plus de 50 000 allocataires du RSA (sur un total d’environ 1,2 million aujourd’hui) ont intégré ces initiatives pilotes. Un échantillon de plus de 1 800 d’entre eux a été interrogé. Ces derniers sont 90 % à se déclarer satisfaits de leur accompagnement, dont 50 % « très satisfaits ». Ces réponses sont globalement homogènes sur les territoires pilotes sondés.
Retour à l’emploi. « Le premier motif de satisfaction mentionné par les bénéficiaires concerne le relationnel, notamment la qualité de la communication et de l’écoute, ainsi que l’engagement des conseillers », détaille le document. Si les attentes diffèrent selon les parcours et les difficultés rencontrées par les allocataires, ils disent « reprendre confiance en eux » et « prendre soin d’eux » grâce à cet accompagnement.
Qu’en est-il de leur retour à l’emploi ? Pour ceux inscrits depuis au moins douze mois, 54 % ont accédé à un emploi sur la période. Mais lorsqu’on fait le tri dans les durées de contrats, ils ne sont plus que 27 % à avoir pu occuper un emploi dit « durable » (CDI ou CDD de plus de six mois). Ce qui ne signifie pas toujours qu’ils le gardent : au bout de ces douze mois, 34 % des allocataires occupent toujours un emploi, dont 19 % un emploi durable. Au total, les expérimentations ont permis à 42 % des allocataires de sortir du RSA au bout d’un an, contre 30 % au bout de six mois.
Ces chiffres sont plutôt encourageants, d’autant qu’ils confirment ce à quoi on pouvait s’attendre : avec le temps, l’ensemble des indicateurs s’améliorent. Ainsi, le taux d’accès à un emploi au bout de six mois est de 40 %, soit 14 points de moins que le taux évalué avec six mois de plus dans le parcours.
Toutefois, les profils sont très divers et certains allocataires du RSA se montrent bien plus éloignés de l’emploi que l’ensemble des demandeurs d’emploi, avec de nombreux freins à traiter. 63 % des allocataires sondés ont un diplôme inférieur au bac alors qu’ils sont 44 % sur l’ensemble des demandeurs d’emploi, par exemple.
En tout, 83 % des allocataires ont au moins un frein à surmonter pour trouver un emploi : presque la moitié présente des difficultés de mobilité, plus d’un quart a des freins financiers et de santé, un quart des difficultés liées à leur situation familiale (garde d’enfants, par exemple), et un cinquième des problèmes de logement. Les allocataires intégrés dans le parcours « social », qui s’adresse aux plus éloignés de l’emploi, « attendent de l’aide pour répondre aux besoins autres que le retour à l’emploi ou la formation (transports, garde d’enfants, santé, logement, aide financière) », indique le document.
Orientés plus vite. Sans pouvoir régler à elle seule ces freins, la réforme ambitionne en tout cas de faire accéder les allocataires à tout un panel d’activités. Un effort qui prend du temps. Au bout d’un an, 13 % des allocataires ont fait une formation et 6 % ont pu faire une immersion en entreprise. Dans les faits, les quinze heures d’activités hebdomadaires ne sont pas toutes accomplies : elles sont « atteintes principalement » pour le parcours emploi, mais « de façon inégale » pour les deux autres parcours, dont le parcours « social », souligne le document.
De plus, ce temps hebdomadaire est composé « d’une part importante d’activités en autonomie ou semi-autonomie (recherche d’emploi, rédaction de CV, PMSP [périodes de mise en situation en milieu professionnel], RDV médicaux…). Ainsi, il ressort de l’évaluation et des échanges avec les conseils départementaux que les parcours ne comprenant que des heures d’activité en face à face sont rares, notamment pour le public le plus éloigné ».
Globalement, ce que retient ce point d'étape est que les allocataires RSA sont orientés plus vite et de manière plus individualisée vers les trois différents types de parcours conçus pour répondre à leurs situations propres. L’accompagnement est lui aussi plus individualisé, mais ne remplit pas forcément l’objectif des quinze heures hebdomadaires. De plus, le « contenu » de cet accompagnement a encore « peu évolué ». Des « marges d’amélioration » sont identifiées pour la suite : interconnexion des systèmes d’information, connaissance et mobilisation de l’offre d’insertion, mobilisation des entreprises…
Le ministère du Travail effectuera un prochain bilan quantitatif à la moitié de l’année prochaine, puis une autre fin 2025 visant à comparer des trajectoires des allocataires RSA des territoires pilotes à celles des allocataires dans des territoires similaires.
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