Immigration
D’ici à un mois, le ministre de l’Intérieur devrait publier une version plus restrictive de la circulaire Valls, qui limitera les régularisations de travailleurs aux seuls métiers en tension.
L'Opinion - 23 octobre 2024 - Par Marie-Amélie Lombard-Latune et Christine Ollivier
Bruno Retailleau est un homme pressé. Annoncée il y a deux semaines par le ministre (LR) de l’Intérieur, la refonte de la circulaire Valls permettant de régulariser à titre exceptionnel des étrangers en situation irrégulière avance à grands pas. Les préfets recevront dans les prochains jours une première circulaire dite de « pilotage » pour s’assurer de la mobilisation des représentants de l’Etat et de leur « implication personnelle et resserrée » sur le terrain de l’immigration, dit-on au ministère de l’Intérieur. Une seconde suivra, d’ici à fin novembre ou début décembre, pour se substituer à la circulaire Valls, qui fixe depuis 2012 le cadre des admissions exceptionnelles au séjour. Objectif du gouvernement : relever le niveau d’exigence des critères requis pour obtenir le précieux sésame.
Concernant les séjours accordés pour des motifs familiaux (conjoint français, enfants scolarisés...), les conditions de logement ou de revenus seront ainsi durcies pour être alignées sur celles imposées dans le cadre du regroupement familial. S’y ajouteront des critères d’intégration, tels que la maîtrise du français, et de respect des « valeurs de la République ». Les régularisations d’immigrés en situation irrégulière au titre du travail seront quant à elles limitées aux seuls secteurs en tension... dont la liste reste encore à fixer. Après des consultations menées à l’échelon régional, il revient désormais au ministère du Travail d’en conduire avec les partenaires sociaux à l’échelon national pour définir les domaines d’activité dont le manque de main-d’œuvre justifierait l’obtention d’un titre de séjour exceptionnel.
Un texte aux contours encore flous doit venir « compléter » début 2025 celui de janvier 2024, en réintégrant notamment les dispositions qui avaient été censurées par le Conseil constitutionnel
Ricochet. Dans le « triptyque migratoire » qu’il affiche — international, européen, national —, Bruno Retailleau ne manque pas de mentionner la visite d’Etat d’Emmanuel Macron au Maroc à laquelle il participera à partir de lundi 28 octobre après avoir rencontré le Président en tête-à-tête une semaine plus tôt. Elle aura pour toile de fond le cas concret et dramatique du meurtre de la jeune Philippine, le 20 septembre, dont le principal suspect est un Marocain que la France tentait de renvoyer dans son pays. Paris, qui a fait en juillet un grand pas diplomatique vers le royaume chérifien dans le dossier du Sahara occidental, attend d’être payé de retour. Si besoin, des leviers tels que les visas accordés par la France (143 000 en 2022) ou les accords commerciaux seront actionnés.
Le Maroc est depuis longtemps considéré comme « un mauvais coopérant migratoire ». Sur ce point, les relations de Paris avec Rabat sont souvent plus tendues qu’avec Alger. La visite d’Emmanuel Macron est censée rétablir l’équilibre, voire mettre aussi, par ricochet, la pression sur la présidence Tebboune, la révision de l’accord franco-algérien de 1968 étant toujours à l’agenda du gouvernement Barnier.
A l’échelle nationale, une loi aux contours encore flous doit venir « compléter » début 2025 celle de janvier 2024, en réintégrant notamment les dispositions qui avaient été censurées par le Conseil constitutionnel, car relevant de cavaliers législatifs. Mais ce front-là est miné. « C’est une mauvaise idée de passer son temps à vouloir remettre des lois, alors que les décrets d’application ne sont même pas pris », a mis en garde, mercredi sur France inter, l’ex-Première ministre (EPR) Elisabeth Borne, relayant l’hostilité que suscite déjà cette perspective dans les rangs macronistes.
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