
Tribune
La surtaxe sur les bénéfices des grandes entreprises prévue dans le budget 2025 est une erreur économique et une faute politique, estime le président de l’Union des droites pour la République (UDR).
Le Figaro - 4 février 2025 - Par Eric Ciotti
Nos chefs d’entreprise sont au bord du burn-out. Il fallait être sourd pour ne pas entendre le cri du cœur du patron de Michelin devant les sénateurs le 22 janvier dernier. Encore une fois, le gouvernement a choisi la facilité : taxer plutôt que réformer. Plutôt que de s’attaquer aux déficits abyssaux de l’État, il préfère ponctionner un peu plus ceux qui font tourner l’économie française. La nouvelle surtaxe sur les bénéfices des grandes entreprises est une erreur économique et une faute politique. Elle affaiblira notre compétitivité et accélérera la fuite des talents et des capitaux, tout en envoyant un signal catastrophique à nos entrepreneurs et investisseurs.
Lorsque Bernard Arnault alerte sur la taxation abusive du « made in France » qui pousse déjà LVMH à investir ailleurs, ou lorsque le PDG de Michelin rappelle nos retards de compétitivité dus à nos auto-contraintes réglementaires et fiscales, il ne s’agit pas de simples lamentations. C’est un cri d’alarme sur un modèle qui, à force de surtaxer ceux qui créent la richesse, les pousse à partir. Qui sera le prochain ?
Modèle anti-économique
La France est le pays d’Europe qui taxe le plus ses entreprises. Avec un impôt sur les sociétés à 25,8 %, des impôts de production représentant près de 4 % du PIB contre 0,4 % en Allemagne et une fiscalité instable, notre pays s’est enfermé dans un modèle anti-économique. Cette surtaxe, censée rapporter 8 milliards d’euros en 2025, frappera directement ceux qui portent l’emploi.
Le cas de LVMH est emblématique. Le groupe réalise à peine 7 % de son chiffre d’affaires en France, mais y paie 50 % de ses impôts mondiaux. En 2023, il a contribué à hauteur de 8 milliards d’euros aux finances publiques, dont 3 milliards d’impôts sur les sociétés, l’équivalent de la moitié du budget du ministère de l’Agriculture. Avec TotalEnergies, ces deux entreprises à elles seules contribuent pour 2,5 % de la richesse nationale. L’idée selon laquelle ces entreprises doivent « payer leur juste part » est un mensonge. Ce sont elles qui financent une grande partie de nos services publics, créent des emplois, assurent le rayonnement économique de notre pays et s’ancrent le plus souvent dans la France des territoires. LVMH, ce sont avant tout des milliers d’emplois dans la Drôme, dans le Maine-et-Loire ou le Loir-et-Cher.
La France doit redevenir un pays où l’on peut réussir, un pays qui protège ceux qui produisent plutôt que de les accabler.
Pour elles, la délocalisation n’est plus une menace lointaine. Chaque année, 1000 entreprises quittent la France, emportant 25.000 emplois. Longtemps, on a expliqué ces départs par la recherche de bas salaires. Aujourd’hui, c’est le matraquage fiscal et réglementaire qui les pousse à partir. Contrairement aux idées reçues, délocaliser ne signifie plus seulement partir en Asie pour réduire les coûts salariaux. LVMH investit aux États-Unis, où les salaires sont plus élevés qu’en France, mais où l’environnement fiscal est plus stable et incitatif, où la prospérité n’est pas confisquée.
Le gouvernement prétend protéger les salariés en surtaxant les grandes entreprises, mais il fait l’inverse. Moins de compétitivité, c’est moins d’investissements, d’emplois et de hausses de salaires. Quand une entreprise part, ce sont des emplois qui disparaissent et les salariés qui en pâtissent. La France subit simultanément une immigration massive et une émigration des forces vives. Nos ingénieurs, médecins, chercheurs, cadres partent, tandis que d’autres pays bénéficient de leur dynamisme. Notre pays n’a jamais été aussi lourdement taxé, alors qu’il s’appauvrit précisément à cause de cette fiscalité excessive.
Sortir de cette spirale infernale
Ce matraquage fiscal touche aussi les salaires et le capital. La France est le pays de l’OCDE où les prélèvements obligatoires sont les plus élevés, atteignant 45 % du PIB en 2023. Résultat : un employeur paie cher un salarié qui, lui, touche peu. Ce différentiel contribue au déclassement de la classe moyenne. L’inflation rogne le pouvoir d’achat, et la fiscalité sur les successions atteint 45 %, freinant la transmission entre génération et l’initiative entrepreneuriale.
L’exaspération est totale face à une bureaucratie qui asphyxie la création de valeur
Eric Ciotti
Il est temps de sortir de cette spirale infernale. Plutôt que d’étouffer notre économie sous des taxes toujours plus lourdes, nous devons réduire les impôts de production, simplifier la réglementation, stabiliser la fiscalité et réduire la dépense publique inefficace.
Ce réveil est aujourd’hui partagé par une partie grandissante du monde économique. La parole se libère et, pour la première fois, chefs d’entreprise et citoyens se rejoignent dans un même cri d’alarme. L’exaspération est totale face à une bureaucratie qui asphyxie la création de valeur et face à un État incapable de se réformer. La France doit choisir : récompenser ou punir ceux qui travaillent et réussissent ?
Redonner confiance
L’heure est à la défense des entrepreneurs, des créateurs, des chefs d’entreprise, des salariés valeureux et de tous ceux qui font vivre notre pays. La France doit attirer les talents et les capitaux, et non pas les faire fuir. Pour cela, il faut une fiscalité qui soutienne l’investissement et l’innovation. L’urgence est de libérer l’économie, de relancer la production et de redonner confiance à ceux qui créent de la richesse. L’État doit donc faire des économies pour les rendre aux Français et les injecter dans l’économie : cela seul permettra de retrouver entre 4 et 5 points de croissance.
Il est encore temps d’arrêter l’hémorragie. Nous avons les solutions. Mais si nous ne réagissons pas, si nous continuons à surtaxer ceux qui réussissent, bientôt il n’y aura plus d’entreprises à surtaxer, plus d’investisseurs à pressurer, plus de talents à retenir. Alors qu’un vent de liberté souffle dans le monde, il est temps d’agir.
La France doit redevenir un pays où l’on peut réussir, un pays qui protège ceux qui produisent plutôt que de les accabler. Il est temps de quitter la route de la servitude pour retrouver celle de la liberté et de la prospérité.
- Hits: 106