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Regrets ou pas, la sortie du Royaume Uni de l’Union européenne n’est pas une surprise, mais ne nous trompons pas dans les prises de position des responsables européens.

Par Henry d'Arcole - Ambition France - 28 juin 2016

Campagne démagogique ou crise identitaire ? Opposition à l’omni-activisme de Bruxelles, ou recherche de statut particulier pour affirmer son identité nationale ? Pourtant la non adhésion à la zone euro en 1992 du Royaume Uni n’a entraîné aucune catastrophe : le Royaume Uni a poursuivi son redressement amorcé dans les années 1980 avec Margaret Thatcher, dépassant la France en terme de réduction du taux de chômage dans les années 1988-1990, puis en tant que 5ème puissance en 2016.


Et en écho, les dissonances du « moteur franco-allemand » en raison du fossé qui sépare le président de la République et la chancelière. Le premier souhaite se concentrer sur l’essentiel, « l’investissement pour la croissance et pour l’emploi » avec « le renforcement de la zone euro » (sous entendu une critique de la politique d’austérité dont la responsabilité retomberait sur Angela Merkel, et une plaidoirie pour la mutualisation des dettes), rhétorique sans succès tenue dès 2012 se heurtant au principe des réalités faute d’une politique courageuse en termes de réformes structurelles. A l’inverse, la chancelière joue la cohésion « ensemble » (gemeinsam) entre les 27 Etats membres par le respect des engagements de chacun (respect des critères de Maastricht, c’est-à-dire le retour à l’orthodoxie budgétaire). Peut-il être reproché à l’Allemagne, c’est-à-dire au social-démocrate Gerhard Schröder d’avoir servi l’intérêt général au détriment de sa propre carrière politique en entreprenant les réformes nécessaires ? Si cette sortie ou Brexit est bien le symptôme d’une panne dans le « projet européen » depuis 2007, s’agit-il d’un risque de « dilution de l’Europe » comme le craint le président de la République (24 juin 2016) ou d’« une césure pour l’Europe et son processus d’unification » selon Angela Merkel ?

Quelle césure ?

Le Brexit atteste d’abord de la fin d’un mythe, celui d’une Europe unie, d’une « union toujours plus étroite » et de plus en plus intégrée selon le principe du marché intérieur unique. C’est donc la fin du « rêve européen » ou du « projet européen » tel que géré par une technostructure (ou deep state) et des politiques qui défendent une utopie sans aucun lien avec les réalités économiques ou quotidiennes des citoyens européens. Précisons : aux lendemains de la guerre, en réponse aux tragédies et aux traumatismes liés aux crimes contre l’humanité (1914-1945), sont nés des « projets » relevant du bien-fondé utopique pour un monde pacifique et humaniste. Idéaux communs à atteindre loin de toute analyse des réalités socio-économiques, mais forts de concepts théoriques issus d’une analyse dogmatique, donc monolithique destinée à construire un monde meilleur. Projets conduits par une volonté affirmée d’une transformation rigoureuse des conditions d’existence des citoyens, mais bien malgré eux considérés comme trop « conservateurs », voire rétrogrades. Projets mondialistes vigoureusement contestés dès 1948 sur le plan philosophique, religieux et juridique soulignant la nécessité de lien entre droits et devoirs de l’homme indissociables. Les événements par la suite témoignent de leur côté irréalisable : « projets » humaniste universel (onusien succédant à l’idéal wilsonien), européen et même « républicain » sous influence d’intellectuels issus des forces dites « de gauche » (Sartre contre Aron ou Camus) et portés par une analyse abstraite, mécaniste, déshumanisée et globalisante, sous prétexte historique (pour ne pas dire marxiste). En l’espèce, une approche idéaliste d’une certaine idée européenne, projet « construit pour la paix » (d’où le prix Nobel obtenu en 2012) et non pour « être en guerre », mais réductrice sur le plan humain, voire sur le plan démocratique. Une construction européenne conçue par des politiques « éclairés » convaincus ou conscients que les peuples européens n’étaient pas prêts à les suivre.
Comme l’a compris la chancelière allemande, dont la conscience politique s’est forgée sous l’ancienne RDA, désormais la construction de l’Europe met face à face fédéralistes contre souverainistes (ou unionistes), avec un risque qui ne peut qu’aggraver le cycle de désintégration de l’UE : consolider des institutions supranationales hors contrôle démocratique imposant des limites aux peuples souverains (comme l’imposition de quotas de migrants aux Etats membres, ou la participation de la Turquie). Les prises de position « moralisatrices » de Jean-Claude Juncker (« ce n’est pas un divorce à l’amiable », 25 juin 2016) sont d’autant moins satisfaisantes que la position du Royaume Uni repose sur un vote démocratique (72% de participation). Le vote met un coup d’arrêt à une intégration plus large ou plus poussée de l’Europe, et notamment de la zone euro, dans les conditions actuelles : à défaut d’avoir écouté les votes précédents des citoyens européens, c’est une spécificité nationale, en l’occurrence britannique, qui s’est ainsi exprimée.
Or, si les populismes se sont accrus en même temps que l’euroscepticisme, c’est qu’il existe un décalage croissant entre les institutions européennes et les opinions publiques qui ne se sentent pas écoutées malgré les avertissements de 2005. L’Union européenne survit à un point de non-retour depuis la crise financière de 2008-2011 qui a montré les faiblesses des uns et la nécessité du respect des engagements des autres : le noyau dur de la souveraineté était déjà atteint ce qui a cristallisé les opinions publiques. La crise grecque, puis celle des migrants ne sont que des symptômes qui ont révélé que « Bruxelles est nu ». Elles mettent les politiques en face de leur responsabilité et de leurs devoirs : faire carrière dans le politique, ou écouter les opinions publiques ? gérer le court terme ou le long terme, l’intérêt particulier ou l’action publique née de la volonté générale ?
Bref, ne nous trompons pas de césure. S’agit-il seulement de construire une future Europe « à la carte » avec différents niveaux d’intégration selon les domaines communs (zone Euro, Schengen, etc.) ? Le vote britannique revient comme un boomerang vers la Commission européenne qui a poursuivi ses actions dans une ligne autodestructrice pour elle en raison d’un déficit démocratique par le refus de prendre en compte les résultats des référendums de 2005 ; et par la multiplication de normes justifiant la bureaucratie européenne contre les populations et la vie des terroirs. Le ressenti devient déception et exaspération. Mais de manière différente en France et en Allemagne. La gestion de la crise surprend la France sans autorité, affaiblie économiquement. Mais cela peut être une opportunité pour la France de définir une priorité collective, presque de salut public, pour redresser les comptes publics grâce à un effort général de remise en cause de ses structures pour recouvrer sa compétitivité et son influence. Et pour agir en concertation avec une Allemagne qui bénéficie de finances saines, d’une image économique et industrielle forte et de la présence de la BCE à Francfort à un moment où la City – qui conserve un pouvoir d’attraction par la libre prestation de services, le libre établissement, le savoir-faire, la présence d’investisseurs et l’ouverture mondiale – risque de jouer du dumping pour maintenir son rang.
Avec le Brexit, les réalités socio-économiques s’imposent désormais à l’Europe, et tout changement oblige à se démarquer des idées reçues et de la logique des pensées uniques réductrices. Le Brexit est une chance qui impose aux responsables européens une vision de l’Europe plus proche des citoyens. Toute une symbolique, à commencer par le rétablissement du principe de réalités à Bruxelles, en imposant que tous les élus et fonctionnaires européens soient soumis à l’impôt.

Recentrer le « projet » européen à la lumière des votes

Le rejet de la Constitution par référendum organisé en 2005 en France (55% de votes négatifs), aux Pays-Bas (56%) et au Luxembourg (61%) n'a ni été clairement expliqué, ni bien compris par l'exécutif européen inquiét déjà de l'euroscepticisme et de la montée des extrêmes dont les origines seraient liées « à la menace populiste et à la propagation d'idées contraires aux idéaux de la construction européenne » (Herman Van Rompuy, avril 2012). Et ce dernier de poursuivre : « Malheureusement, les vents du populisme menacent une des grandes réalisations de l'intégration européenne : la libre circulation des personnes au sein de l'UE », tandis que le président du Parlement européen, Martin Schulz (SPD), lançait : « L'ultra nationalisme (...) est une vraie menace pour l'idée européenne », mais lucide : « L’Union est dans un état lamentable. Comme le dit Wim Wenders, "l’idée européenne est incontestée, mais l’idée est devenue l’administration et les gens prennent l’administration pour l’idée". Je compte donc changer l’administration, pas l’idée. Avec la grande coalition allemande, François Hollande en France, Enrico Letta en Italie et les petits États membres, on a une fenêtre d’opportunité pour rééquilibrer l’Union » (11 mars 2014). Aucune analyse de fond sur ces populismes, mais des réactions tardives et décalées car il n’est proposé qu’une Europe moins intergouvernementale, moins tendance austérité, moins normative, et forcément plus sociale dans une interprétation sociale-démocrate (plutôt nordique que socialiste à la française) ou sociale-libérale. Sans aucune inversion de logique.
Faut-il y déceler deux interprétations, deux vérités – à moins que les deux s'apostrophent – : excès de populisme ou rejet de la Commission ? La contestation de citoyens européens vient d’être portée par le Brexit à son paroxysme suite à l'enchaînement de crises successives – crise de l’euro (2008-2011) ; crise grecque, été 2015 ; afflux de migrants, dès l’automne 2015 (refus en septembre 2015 par quatre pays membres du système de quotas et de la politique européenne d’asile jugée trop généreuse) ; actes de terrorisme répétés en 2015 et en 2016 –. Ce nouveau rejet démocratique affaiblit la dimension du « projet européen » initial, vision top down, à savoir l'intégration économique de l'Union européenne vers un marché unique avec une monnaie commune.
Si le « non » l'a emporté aux référendums de 2005, et si aux dernières élections européennes (24-26 mai 2014) les partis aux extrêmes ou eurosceptiques ont accru leur représentation de près de la moitié du nombre de députés (passant de 20,3% à 30,4% du nombre total des députés, le PPE et les SD réunis passant de 470, ou 61,3%, à 397 députés, soit 52,8% des députés), cet euroscepticisme n'est pas un « non » à l’Europe, à la construction ou à l'unité européennes. C’est un « non » au « projet européen » conçu initialement pour dépasser les Etats-Nations membres (sous-entendu « fauteurs de troubles » et « responsables » des deux dernières guerres mondiales), dépassement assuré grâce aux modes de gouvernance des institutions européennes. L’inversion de logique s’inscrit dans ce constat : le déficit démocratique de ce type de gouvernance ; et l’effacement de l'identité européenne, pourtant débattue lors des élargissements successifs dès la période 1968-1973. De même que l’Allemagne a réussi à surmonter son traumatisme historique par le refus de toute dictature, de même l’Europe doit achever sa construction en renouant avec ses racines et ses valeurs culturelles tout en assurant sa sécurité et celle de ses citoyens.
Car c'est bien un « non » à la manière dont les institutions européennes conduisent avec certitude leurs différentes politiques. Exemples significatifs : sous couvert de l'art. 49 du TFUE, les élargissements successifs, dont le dossier de la candidature de la Turquie déposé en 1987, sujet de controverse majeur et régulièrement activé malgré l'opposition d'une grande majorité d'Européens ; ou plus récemment la question de l'Ukraine manifestée par son refus de signer en janvier 2014 l'accord d'association avec l'Union européenne. Institutions tout aussi incapables d’assurer la sécurité, de garantir les frontières et de sauvegarder les actifs économiques de leurs Etats membres (face aux Big Five de l'internet tels Google, Apple, Facebook, Amazon dits GAFA, ainsi que Microsoft). Et plus généralement d'introduire une dimension extérieure dans la construction européenne : qu’en est-il du principe de réciprocité, notamment avec les États-Unis sur des dossiers juridiques comme celui des sanctions contre l'Iran ou certains pays émergents, ou celui du traité transatlantique, le TAFTA, ou par la mise en réserve de ses marchés publics a minima pour les PME-PMI européennes ? qu’en est-il de la protection de la diversité de nos cultures ou de nos traditions auxquelles se réclament les citoyens européens, etc. ?
Autrement dit, c’est moins « l'épuisement financier du système social » ou la crise économique qui ont exacerbé le « doute européen » que la priorité sans faille donnée par « l'administration » (la Commission européenne) à la dimension interne de la construction européenne au nom d'idéaux sans véritable « projet » politique réaliste. La crise grecque (juillet 2015) est emblématique : elle souligne la nécessité du respect des engagements, notamment sur le plan des règles budgétaires, et l’importance du principe de responsabilité par opposition aux projets trop consensuels proposés par la Commission européenne. D’où la perte de crédibilité croissante de la France parmi les Etats membres par accumulation sans discontinuité de ses déficits publics depuis 1974 accroissant de facto son endettement sous prétexte d’une « modèle social » que personne ne nous envie et dont le différentiel avec les « bas salaires » ou « petits boulots » de l’Allemagne est financé par la dette (à la charge de nos enfants). D’où les exigences légitimes de l’Allemagne qui a su se réformer en quatre ans (2003-2007), modèle d’un cercle vertueux pour son économie, désireuse de mutualiser les dettes qu’à la seule condition que tout engagement soit respecté.
Soyons clairs. Le « projet » européen n’est viable que s'il repose sur deux exigences : solidarité et responsabilité. Et au prix du maintien de la compétitivité européenne (impératif économique garant du progrès social), là encore mal évaluée par la Commission européenne (cf. la Stratégie de Lisbonne en 2000, réaffirmée en 2005) faute d’avoir intégré la dimension extérieure dans un monde global, concurrent et souvent déloyal ; et au prix du respect des obligations par chaque État membre, mais sans nullement exclure la solidarité (impératif juridique qui repose sur le principe de responsabilité).

Le « projet » européen doit désormais intégrer la dimension extérieure : la sécurité

Les crises sur fond de scepticisme que connaissent les 28 États européens trouvent donc leurs origines dans la manière dont a été construite l'Union européenne au cours des vingt-cinq dernières années, et dont les compétences de la Commission ont été élargies. Les obligations européennes issues des traités qui s'imposent aux États membres réduisent leur droit souverain sans pour autant créer une contrepartie réelle justifiant ces abandons de souveraineté appelés à sauvegarder les « intérêts stratégiques » de chacun des États membres. Il en est ainsi pour les Affaires intérieures (qui incluent la sécurité – Schengen, terrorisme, sécurité économique, etc. –), la Défense restant un domaine (encore) réservé. Or, telles que les Affaires intérieures sont gérées par les institutions européennes (migrations et contrôle des frontières), le point de non-retour est désormais atteint, avec une rupture effective, celle du Brexit.
Les questions de sécurité ont été présentes lors du vote pour le Brexit car, de plus en plus souvent traitées par l'Union européenne : la Commission européenne s'invite de manière croissante par le droit (adoption de directives, décisions, textes ou normes, etc.) dans les prérogatives des États membres. Elle intervient tout autant dans leurs politiques publiques internes en raison des impératifs de sécurité pour les populations européennes (sécurité économique des consommateurs, sécurité alimentaire, sécurité des travailleurs, sécurité en matière de transport, sécurité maritime, mais aussi dans les domaines de la protection civile, la sécurité intérieure, la protection des données personnelles, etc.) que plus récemment dans leurs domaines régaliens avec la mise en place de l'espace de liberté, de sécurité et de justice (devenues « affaires intérieures »), mais sans jamais pouvoir adopter une posture politique consentie par les citoyens.
Entre la finalité intérieure (construction du marché unique) qui a occulté le risque de « guerre économique » ou « unfair competition » perçue dès 1991 ou des risques extérieurs (terrorisme) malgré le poids croissant d'une double contrainte extérieure (globalisation et émergence d'une économie de l'information), le concept de la « sécurité nationale » appliqué à l'Union européenne n’a pas reçu la place qu'il mérite. Il n'a pas pu modifier sa perception traditionnelle (protection du secret et « besoin d’en connaître ») en vue de la sécurisation de nos territoires et de la défense des « intérêts européens ». Pis, au cours des dix dernières années, le « projet européen » s'est fragilisé en poursuivant inexorablement son élargissement et son intégration (malgré les référendums de 2005 ou la frilosité de l’Irlande, du Danemark, des Pays-Bas, ou des quatre pays de l'Est ex-communistes réunis dans le groupe de Visegrád).
La sécurité européenne se heurte au refus de toute initiative institutionnelle pouvant introduire des éléments de nature politique afin d'assurer le passage vers une organisation fédérale. Telles sont les tergiversations dans « le choix de la marche en avant » et l’ambiguïté sur le rôle d'institutions européennes assurant des fonctions régaliennes qui fondent toute souveraineté (BCE et gestion de la zone euro ; espace Schengen avec le contrôle des frontières et la possible interrogation de son système d’information, SIS ; ou AED limitée à la gestion de crise). Si un toujours possible « retour en arrière » est démontré par l’expérience du Brexit et si le fait que « nous sommes en situation de guerre », les politiques se doivent de réagir et assumer leurs responsabilités contrairement à ce que pensent la Commission européenne ou certains députés européens qui ont longtemps été opposés au projet sur le PNR (Passenger Name Record) malgré l’accord passé entre le Parlement européen, le Conseil européen et la Commission.
Plus grave encore, malgré l'énoncé de la stratégie de Lisbonne (2000), sous la menace hyper concurrentielle et l’asymétrie du volet externe de la construction européenne, la compétitivité européenne vacille tandis que nos actifs économiques, notamment informationnels, sont menacés d’être pillés. La gestion des Affaires intérieures est ainsi interpellée par la transformation digitale de notre société avec ses enjeux et ses menaces liées à la cyberwar sous différentes formes, dont le terrorisme, la criminalité et la concurrence déloyale. Les cyberattaques ciblent les Etats membres, leurs activités et infrastructures stratégiques ou vitales, leurs entreprises comme l'ensemble de leurs actifs et patrimoines ce qui fragilise toute souveraineté nationale à défaut d'une réponse adaptée dans le cadre de l'Union européenne tant en termes de la protection des « secrets d’affaires » (avril 2016) qu’avec le projet de directive Network Security and Informations (NIS) prévue en 2018 plus de vingt ans après les Etats-Unis.
Sécurité et compétitivité sont des priorités stratégiques qu’un Etat membre ne peut abandonner ce qui remet en cause la finalité du « projet européen ». Contestée par les citoyens, une économie ainsi ouverte n'exclut pas une approche plus globale de sa sécurité, notamment de la sécurité économique : il s'agit à présent de dépasser ce qui a été le moteur interne de la construction européenne et de réconcilier le droit de la concurrence avec « l'intérêt européen ». La crainte des négociations transatlantiques (accords de libre-échange appelée TAFTA/CETA ou TTIP et Canada) peut être tempérée par la décision de la CJUE du 5 octobre 2015 relative aux transferts de données personnelles : l’UE est capable de s’affirmer.
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Renverser la logique dans la rupture entre l'Europe (comprenez le fonctionnement des institutions européennes actuelles) et ses citoyens ce qui conduit à une défiance des seconds à l’égard de la première est d’autant plus justifié que le ressenti entretient une méfiance croissante depuis 2005-2008.
Dès lors, toute crise devient une opportunité pour redéfinir la gouvernance européenne et assurer le passage à la supranationalité autour de dénominateurs communs, telle la sécurité (antiterrorisme, mais aussi sécurité économique), attribut de toute souveraineté – la sécurité économique incluant la protection et la défense de ses « intérêts essentiels » –. Une gouvernance qui n’abuse pas d'un protectionnisme défensif (incluant le principe de réciprocité), construit autour de deux axes stratégiques, l'un grâce à un relatif interventionnisme en faveur d'un développement ouvert, équilibré, régulé destiné à renforcer la compétitivité ; l'autre autour d'une double stratégie, digitale et d'influence, suite à la numérisation du monde (cyberespace).