Jean-Luc Mélenchon veut instaurer 14 tranches pour l'impôt sur le revenu. (ANDBZ/ABACA)

Fiscalité

Le leader de la coalition Nupes annonce un vaste chantier de l'impôt sur le revenu, censé taxer davantage les contribuables gagnant plus de 4.000 euros par mois. Avec toutefois des effets contrastés selon la situation des ménages.

Les Echos - 16 juin 2022 - Par Renaud Honoré

Pour une fois, il serait presque possible de mettre d'accord Jean-Luc Mélenchon et François Hollande. Comme l'ancien président socialiste qui avait jugé un temps qu'on était riche à 4.000 euros par mois, la refonte profonde de la fiscalité des revenus des ménages que promet le leader de la coalition Nupes vise avant tout cette catégorie de la population. Avec toutefois des effets surprenants qui toucheraient bien d'autres contribuables, au vu des simulations déjà disponibles.

Dans le vaste plan de 160 milliards d'alourdissements des impôts que prévoit l'alliance de gauche, une part minoritaire (environ 48 milliards tout de même) concerne les ménages. Cela passerait notamment par un alourdissement de la taxation du patrimoine des plus riches. L'ISF serait ainsi rétabli et nettement renforcé (avec 10 milliards de recettes contre 4 milliards pour sa dernière année en 2017) et la taxe foncière serait revue pour alléger le fardeau des plus pauvres et alourdir celui des ménages aisés (1,5 milliard).

Taxation des héritages

Jean-Luc Mélenchon veut aussi taxer intégralement les héritages dépassant 12 millions d'euros. « Les plus grandes fortunes sont assises sur la valorisation d'actions. Avec ce mécanisme, on les poussera à vendre leurs participations, au risque que les entreprises françaises soient rachetées par des étrangers. A moins que ce soit l'Etat qui rachète, ce qui aboutirait à une forme de collectivisation rampante de l'économie », estime François Ecalle, responsable du site spécialisé Fipeco.

Un grand remue-ménage est surtout prévu pour l'imposition des revenus. Le crédit d'impôt pour l'emploi d'un salarié à domicile serait ainsi raboté de 1 milliard. Mais le plus grand chantier vise à rendre le système plus progressif, avec 14 tranches pour l'impôt sur le revenu (la même chose pour la CSG) contre 5 dans le système actuel. Le quotient conjugal, jugé patriarcal, serait supprimé, de même que le quotient familial remplacé par des crédits d'impôt par enfant. « La France est un des rares pays à avoir ce système de quotient familial qui n'est pas le plus juste, il n'y aurait rien d'anormal à le revoir », souligne François Ecalle.

Effets contrastés

Durant la présidentielle, le leader insoumis avait mis en place un simulateur qui permet de juger des effets de la réforme, censée bénéficier à 92 % des Français, c'est-à-dire tout célibataire gagnant moins de 4.000 euros par mois. Celui rémunéré 1.500 euros payerait 249 euros d'impôt en moins (plus d'impôt sur le revenu, mais moins de CSG) mais le gain monterait à 524 euros pour quelqu'un gagnant 3.000 euros par mois.

Pour un couple sans enfant, les effets sont contrastés : à revenu du ménage égal, vous paierez plus d'impôts selon le simulateur si vous ne gagnez pas le même salaire que votre conjoint. « C'est sans doute les effets de la fin du quotient conjugal », juge François Ecalle.

La barre des 4.000 euros est également très marquée. Un célibataire gagnant 4.500 euros paiera environ 600 euros de plus. Mêmes effets pour un couple. Un cadre rémunéré 4.500 euros par mois marié à une institutrice (2.000 euros par mois) payera 700 euros de plus. Mais la facture s'allonge avec les enfants (1.200 euros pour un enfant, 1.800 pour deux enfants etc.). Un couple de deux cadres (5.000 euros chacun) sera plus taxé de 2.500 euros.