Entretien

Le maire de Meaux presse LR de travailler avec Emmanuel Macron pour imposer une politique de droite ainsi que des réformes.

Le Figaro - 28 octobre 2022 - Par Marion Mourgue

LE FIGARO. - Emmanuel Macron propose une alliance à la droite. Vous aviez été l’un des premiers avec Nicolas Sarkozy à la souhaiter. Vous y retrouvez-vous?

ean-François COPÉ. - L’initiative de M. Macron ne manque pas de panache: pour la première fois, le «Maître des horloges» accepte de reconnaître qu’il n’a plus d’autres choix que de partager les aiguilles! Il prend acte enfin de l’évidence, que sans majorité absolue, il ne peut rien faire. Or face à la radicalisation des parties extrémistes RN comme Nupes et face aux défis considérables qui sont devant nous sur le plan géopolitique, financier, énergétique, sécuritaire, nous ne pouvons pas avoir un exécutif impuissant. Il n’y a donc aucun autre choix qu’un accord de gouvernement avec LR fondé sur un programme de gouvernement beaucoup plus volontariste sur le régalien (sécurité, justice, immigration, éducation) et sur les réformes économiques structurelles (écologie, retraite, finances publiques, santé…)

Pourtant cette position reste minoritaire à droite.

La noblesse de la politique, c’est de savoir parfois décider contre l’avis de ses propres troupes. Ce sera la première décision que devra prendre le président des Républicains nouvellement élu dans quelques semaines. De cette décision dépendra l’avenir de la droite française. Rester dans le statu quo, c’est sombrer dans l’anonymat et réduire ce qu’il reste de notre famille politique à une béquille où nos amis parlementaires seront sommés soit de soutenir le gouvernement sans participer aux décisions, soit de voter avec les extrémistes: dans les deux cas de figure, un vrai cauchemar!

Qu’est-ce qu’une alliance apporterait à LR? N’est-ce pas perdre votre identité et votre indépendance?

Ce qui perd notre identité, c’est de ne pas gouverner ; ce qui ruine notre indépendance, c’est d’apparaître aux yeux des Français comme la tranche de jambon coincée dans le sandwich entre le gouvernement et les partis extrémistes. Comme je l’ai dit dès le lendemain des législatives, un parti de gouvernement c’est fait pour gouverner. Or si rien ne se passe, en 2027, cela fera dix-sept ans que nous n’aurons pas œuvré au service des Français! Et il n’y a aucune raison de penser qu’ils vont spontanément se jeter dans nos bras et ne pas choisir une Marine Le Pen sur le modèle de l’Italie ou de la Suède.

Les LR sont comme les Gaulois de Jules César : « peuple querelleur, batailleur, éternellement divisé mais capable, quand les circonstances le commandent, de se rassembler derrière un grand chef » Concrètement, comment un pacte de gouvernement devrait-il prendre forme? Que demandez-vous à Emmanuel Macron et à LR?

Une réunion au sommet pour tout mettre sur la table! Car c’est à M. Macron de faire des concessions pour un authentique virage à droite et une reprise en main du pays. Les LR - devenus seconde force de la majorité - devront exiger du président un changement radical sur les réformes, et prendre la responsabilité de ministères clés, voire le premier d’entre eux. C’est la meilleure manière de dire aux Français que nous voulons répondre à leurs inquiétudes et faire émerger de nouveaux visages à droite autrement que sur les plateaux de BFM les soirs de défaite. Enfin! Nouveau programme, nouveau gouvernement, nouvel agenda. D’ailleurs, toutes les études d’opinion confirment que la France est dans l’attente d’une politique de droite moderne, capable de rétablir l’autorité quand c’est nécessaire tout en mettant en œuvre un programme économique, social et environnemental audacieux mais juste.

Pensez-vous vraiment que Les Républicains pourront parler d’une seule voix alors qu’il y a tant de divergences sur les retraites, l’immigration, le développement durable?

Les LR sont comme les Gaulois de Jules César: «peuple querelleur, batailleur, éternellement divisé mais capable, quand les circonstances le commandent, de se rassembler derrière un grand chef». Sinon cela ne sert vraiment à rien de s’engager en politique pour la France.

Que répondez-vous à ceux qui estiment que gouverner avec Emmanuel Macron, c’est ne plus laisser d’autres choix alternatifs aux Français qu’un vote pour le RN à la prochaine présidentielle?

Je leur réponds qu’ils ont raison et que le risque existe effectivement! Mais ce risque existe déjà aujourd’hui puisque la droite de gouvernement, on l’a vu cet été sur la loi «pouvoir d’achat» qu’elle a voté, ou sur la motion de censure RN/Nupes qu’elle n’a pas votée, a pu mesurer la limite de ce positionnement. Un autre scénario existe: gouverner jusqu’en 2025-2026 pour mettre en œuvre un certain nombre de réformes que l’actuelle «majorité minoritaire» ne fera jamais et ensuite reprendre son indépendance pour préparer l’élection présidentielle de 2027.