Eric Ciotti, président du parti Les Républicains. Photo Sipa

Réformes

Le nouveau président de LR, à la tête d'un parti divisé sur les retraites, était reçu ce mercredi matin à Matignon par la Première ministre pour échanger sur la réforme qui sera présentée le 10 janvier. Les conditions qu'il a posées ne semblent pas très éloignées du projet de l'exécutif.

Les Echos - 22 décembre 2022 - Par Isabelle Ficek

Les premières rencontres ne sont pas toujours conclusives. Celle de ce mercredi matin, entre la Première ministre, Elisabeth Borne, et le nouveau président des Républicains, Eric Ciotti, n'avait d'ailleurs pas vocation à l'être. Il s'agissait d'aborder, entre autres, la réforme des retraites et ce faisant, de mieux cerner le jeu de chacun dans cette partie serrée pour une réforme difficile sur laquelle l'exécutif mais aussi la droite jouent gros. Cette dernière étant divisée sur le fond et partagée entre quête indispensable de crédibilité et opposition frontale à Emmanuel Macron.

Dans ces travaux d'approche de plus d'une heure, Eric Ciotti a d'abord rappelé, comme une entrée en négociations, que le groupe LR à l'Assemblée détient « la clé » de cette réforme si le gouvernement veut éviter de passer par le 49.3 pour faire adopter ce dossier majeur. Sans majorité absolue au Palais-Bourbon , le groupe LR est en effet le partenaire le plus naturel.

Ne pas se déjuger

A l'issue de l'entretien, le député des Alpes-Maritimes a d'ailleurs assuré qu'il y a « besoin de réforme » pour pouvoir maintenir un système par répartition. « On soutient tous la nécessité d'une réforme, on ne peut pas se déjuger là-dessus », avait-il lancé lundi soir lors d'une réunion du groupe LR pour trouver une position de consensus, rapporte un participant.

Mais Eric Ciotti a aussi assuré avoir posé à Elisabeth Borne « les conditions pour que cette réforme puisse voir le jour ». Il l'a prévenue de l'opposition, désormais, de LR à un recul de l'âge de départ à 65 ans, alors qu'il s'agissait d'un point clé du programme du parti pour la présidentielle.

« Nous mesurons qu'aller à 65 ans tout de suite est d'une brutalité sans doute trop forte par rapport à la situation que vivent les Français », a insisté Eric Ciotti, soulignant que « beaucoup de Français souffrent avec une inflation qui obère aujourd'hui leur pouvoir d'achat ». De quoi, en pointant les difficultés posées par l'inflation, prendre ses distances avec l'objectif affiché par le chef de l'Etat à l'horizon 2031.

Atterrissage

Autres conditions, Eric Ciotti a évoqué le « rythme » de la réforme, son « calendrier » et il a demandé que la situation des « petits retraités » soit prise en compte. Des conditions que le gouvernement peut entendre puisqu'elles ne sont pas éloignées des pistes ou des principes de la réforme - comme le minimum contributif pour une carrière complète à 85 % du SMIC - et de l'atterrissage qui pourrait se dessiner autour d'un recul de l'âge légal à 64 ans et une accélération de la réforme Touraine.

La Première ministre doit à nouveau échanger avec les partenaires sociaux la première semaine du mois de janvier ainsi qu'avec Eric Ciotti. De quoi, a indiqué ce dernier, « voir comment le gouvernement allait écouter » les propositions de LR, « ce qui conditionnera notre vote ». Cela permettra aussi encore à LR d'harmoniser ses positions et de voir comment l'opinion tourne en janvier. « C'est dans leur ADN de le voter, mais il est beaucoup trop tôt pour dire quelle sera leur attitude », estimait, prudent, un conseiller de l'exécutif.

Déclarations pas si éloignées

« Finalement, lorsqu'on écoute les déclarations des uns et des autres, elles ne sont pas si éloignées entre elles », avance une source gouvernementale, en pensant à celle du président du groupe LR, Olivier Marleix, favorable à un recul de l'âge légal à 63 ans d'ici à 2027 et une accélération de la réforme Touraine, et aux propositions de son homologue au Sénat, Bruno Retailleau , plus proches encore des pistes de l'exécutif.

On veut croire au sein du gouvernement que les positions du député du Lot, Aurélien Pradié , sont marginales. Ce dernier, au moment même du rendez-vous à Matignon, twittait encore sa volonté de voir « primer la durée de cotisations plutôt que l'âge ». Et on espère que les positions vont se rapprocher de celles des sénateurs LR.

Bruno Retailleau, lors d'un long entretien technique avec Elisabeth Borne la semaine dernière, a lui aussi insisté sur plusieurs points, notamment sur les droits des femmes avec enfants, la pénibilité, le travail des seniors , les petites retraites - « il faudrait une mesure aussi sur le stock », soutient-il -, la pension de réversion pour les enfants handicapés et les régimes spéciaux. « S'il n'y a que la clause du grand-père pour eux, cela sera perçu comme de l'injustice », prévient-il. De quoi faire phosphorer chez LR comme au gouvernement durant la trêve des confiseurs.