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Dépenses publiques

La Cour veut contribuer aux revues des dépenses publiques lancées par le gouvernement pour trouver des économies, dont le contenu reste flou. Le rapport public annuel de la Cour des comptes pointe une dérive des crédits.

Les Echos - 9 mars 2023 - Par Renaud Honoré

Officiellement, le gouvernement a fait de la réduction de la dépense publique un de ses chevaux de bataille pour 2023. Mais la Cour des comptes a visiblement quelques doutes, au point de proposer son aide.

Le rapport public annuel - qui doit être présenté ce vendredi - pointe ainsi « une situation des finances publiques en 2023 parmi les plus dégradées de la zone euro » et met en avant la nécessité de lancer rapidement des revues de dépenses publiques efficaces pour enfin trouver des sources d'économies. « Nous sommes préoccupés par le redressement des finances publiques. Ça passera forcément par des revues des dépenses publiques, et je ferai des propositions pour que la Cour y contribue », explique Pierre Moscovici, le premier président de l'institution de la rue Cambon.

Le message à Macron

L'ancien commissaire européen a eu l'occasion de passer le message à Emmanuel Macron, à qui il a remis le rapport ce jeudi. Le chef de l'Etat n'a pas la réputation d'être un acharné de la rigueur budgétaire. Mais son ministre de l'Economie Bruno Le Maire avait promis en janvier de lancer rapidement des Assises des finances publiques et une revue des dépenses pour identifier des sources d'économies avec les ministres concernés. Las ! L'actualité sociale autour des retraites a relégué au second plan ce chantier, laissé dans les seules mains des experts budgétaires de Bercy.

« La revue des dépenses publiques consiste à mettre tout le monde à bord. Son premier objectif est d'avoir une meilleure qualité de la dépense publique. Si c'est un exercice purement budgétaire, ça ne marche pas », prévient Pierre Moscovici. Celui-ci devrait dessiner 7 pistes possibles (sur l'éducation, la santé, le logement, etc.) dans les prochaines semaines.

Le « quoi qu'il en coûte » perdure

Il y a visiblement urgence à agir, selon le rapport de la Cour. La fin du « quoi qu'il en coûte », maintes fois annoncée par le gouvernement, peine à apparaître distinctement . La Cour a encore recensé 37,5 milliards d'euros de dépenses liées à la crise sanitaire et au plan de relance en 2022 - « c'est une ébauche de sortie du 'quoi qu'il en coûte' », juge Pierre Moscovici - et toujours 12,5 milliards en 2023. A quoi il faut ajouter les mesures prises ensuite pour amortir le choc inflationniste - particulièrement dans l'énergie - qui ont représenté 25 milliards en 2022 et 36,3 milliards en 2023.

Même en mettant de côté ces éléments exceptionnels, la progression de la dépense publique est de 3,5 % en volume (hors inflation) en 2022 et de 0,7 % en 2023. Soit, pour cette année, un niveau qui reste supérieur à celui préconisé par le gouvernement dans sa feuille de route budgétaire pour ramener le déficit à 3 % du PIB en 2027.

Cette trajectoire était inscrite dans la loi de programmation des finances publiques (LPFP) proposée en septembre, mais qui n'a finalement pas trouvé de majorité à l'Assemblée nationale . De quoi inquiéter Pierre Moscovici qui juge qu'il « est essentiel que notre pays se dote d'une loi de programmation ».

Bonnet d'âne sur la dette

Le premier président de la Cour des comptes prend, toutefois, soin d'ajouter que cette loi devra être « plus réaliste dans ses hypothèses et plus ambitieuse dans ses objectifs ». Les perspectives sur la croissance et les taux d'intérêt se sont détériorées depuis quelques mois par rapport à ce que la LPFP prévoyait. D'autres dépenses se sont annoncées, comme le renchérissement du budget de la Défense voulu par Emmanuel Macron évalué « comme une augmentation de près de 30 % » par les magistrats financiers.

De quoi assombrir aussi le tableau pour les perspectives de la dette publique, attendue à 111,2 % du PIB en 2023. « La France n'est pas en faillite. Mais nous avons un endettement qui devient très problématique, qui pourrait paralyser l'action publique », avec une charge de la dette augmentant au point de rogner toutes les marges de manoeuvre budgétaires, pointe Pierre Moscovici.

Surtout, celui-ci met en garde contre le risque de fragmentation de la zone euro. « En 2027, nous pourrions nous retrouver dans une situation où la France serait dans le trio de tête pour la dette, aux côtés de l'Italie et de la Grèce. Ce n'est pas notre place », plaide l'ancien commissaire européen.

Voir le rapport de la Cour des Comptes