Vue d’artiste d’un trimaran de Vela qui sera capable de transporter 560 palettes, soit un poids de plus de 400 tonnes. Vela

Environnement

La start-up du vainqueur du Vendée Globe, Vela, veut lever dix millions d’euros d’ici fin 2023. De quoi armer ses premiers cargos à voiles de 65 mètres pour transporter des marchandises entre la France et les États-Unis.

 Le Figaro Economie - 22 mai 2023 - Par Annelot Huijgen

«Nous nous inspirons de la course au large pour changer la mobilité maritime», assure François Gabart. Le vainqueur du Vendée Globe, détenteur du record du tour du monde en solitaire, s’est lancé dans la course de l’entrepreneuriat en cofondant en 2022 la société Vela. Avec ses associés Pierre-Arnaud Vallon, Thibault Charles, Michaël Fernandez Ferri et Pascal Galacteros, il est convaincu que le transport de marchandises par la force du vent s’imposera. Pour des raisons écologiques d’abord: le transport, dont 90 % se font par les océans, représente 3 % des émissions de gaz à effet de serre mondiales. Pour des raisons économiques ensuite: les prix du pétrole sont structurellement à la hausse alors que l’énergie du vent est gratuite.

Des armateurs tels que Bolloré Logistics et CMA CGM (le second est en passe de racheter le premier), ainsi qu’une armada de start-up, dont Beyond the Sea, Wisamo (spin-off de Michelin), Seawing (spin-off d’Airbus), Airseas ou encore Neoline, Towt et Les Frères de la côte, se sont attaqués au défi de la décarbonation du transport maritime. Certains convertissent des cargos à l’électrique ou à l’hydrogène, d’autres les équipent de voiles. François Gabart et ses associés, eux, misent sur des trimarans de 65 mètres de long, le double d’un exemplaire classique, capables de transporter 560 palettes, soit un poids de plus de 400 tonnes. Après avoir réussi une première traversée entre la France et les États-Unis en décembre, Vela prévoit de lever 10 millions d’euros d’ici la fin de l’année et de démarrer, en parallèle, le recrutement des équipes et la recherche du constructeur de ses trois premiers bateaux.

Ceux-ci devraient hisser les voiles en 2025 et partir de Bayonne, Bordeaux, La Rochelle et Rochefort. Ils transporteront dans les deux sens des marchandises à haute valeur ajoutée: spiritueux, maroquinerie, cosmétiques et œuvres d’art. «Nous nous concentrons sur l’axe transatlantique car on peut y faire de la voile toute l’année et parce que les États-Unis constituent le second pays d’export pour les clients que nous visons», explique Pierre-Arnaud Vallon, PDG de Vela. Le siège est à Bayonne (Pyrénées-Atlantiques) dans une région proche de l’Espagne et reliée à l’Italie par train, et la société dispose de bureaux à Paris et bientôt à New York, au plus près de ses futurs clients.

Un tarif fixe sur plusieurs années

«Notre solution offre à la fois de la sécurité (les bateaux sont suivis et leur arrivée est annoncée à l’heure près), de la flexibilité (les départs et arrivées se font de ports secondaires au plus près des lieux de production et de consommation), de la rapidité (un délai de quinze jours, inférieure aux cargos si l’on prend en compte à la fois la traversée et le pré- et post-acheminement) et une empreinte très réduite», assure François Gabart. Vela promet un tarif fixe, au début situé entre ceux de l’aérien et des cargos, et ce sur plusieurs années. Un argument de taille pour les entreprises en quête à la fois de visibilité après la forte perturbation de leurs chaînes logistiques et de solutions pour les décarboner.

Notre solution offre à la fois de la sécurité, de la flexibilité, de la rapidité et une empreinte très réduite

François Gabart

Il s’agit souvent, en effet, de leur poste d’émission le plus important. «Pour les produits avec lesquels nous souhaitons débuter, le surcoût ne sera que de quelques centimes», plaide Pierre-Arnaud Vallon. Ambitieux, François Gabart et ses associés espèrent «capter à horizon dix ans 50 % de part de marché sur l’axe transatlantique. Nous voulons avoir de l’impact», souligne celui qui prend le départ de la Transat Jacques Vabre cette année et du Trophée Jules Verne l’an prochain. D’après l’association professionnelle Wind Ship, à laquelle appartient Vela, «la filière française des navires propulsés par le vent est prête à fournir un tiers du marché mondial, mais elle doit avoir équipé cent navires d’ici 2025 pour tenir cette ambition».

La filière estime que près de 300 emplois ont déjà été créés au sein d’une dizaine d’entreprises développant des systèmes de propulsion, de quatre compagnies d’armement et dans les services annexes, et que dix fois plus de postes directs peuvent être créés d’ici 2030, à condition de trouver des financements. Un argument que les acteurs du secteur ne manqueront pas de rappeler au secrétaire d’État chargé de la Mer, Hervé Berville, qui retrouvera les acteurs de la filière lors de l’événement Wind for Goods, dont la deuxième édition se déroulera à Saint-Nazaire les 1er et 2 juin.