Le premier ministre, François Bayrou, lors de la présentation des ses orientations budgétaires pour 2026, à Paris, le 15 juillet. THOMAS SAMSON / AFP

Économie

Concertations accélérées, arbitrages… Le temps presse pour le premier ministre, qui joue son poste sur ce texte.

Le Figaro - 18 août 2025 - Par Julie Ruiz

Il le répète assez, en déplacement, dans les médias et dans sa propre émission sur les réseaux sociaux : François Bayrou ne prend pas de vacances cet été. Le chef du gouvernement, comme ses ministres, le sait depuis que le projet de loi de finances (PLF) 2025 a achevé, en retard, son tumultueux parcours : il joue son va-tout sur le texte, qu’il présentera à la rentrée. Avant cette date butoir (le texte doit être déposé à l’Assemblée nationale au plus tard le mardi 7 octobre), la fin de l’été promet d’être une épreuve en soi.

Dès le 25 août, les tractations entre le gouvernement et les forces politiques représentées au Parlement vont reprendre. Et, vu la charge de polémique que contient le « plan Bayrou » - près de 44 milliards d’économies à faire en 2026 avec des mesures controversées (suppression de jours fériés, gel des retraites…) -, les discussions promettent d’être plus que tendues. « Le premier ministre a mis sa copie sur la table mi-juillet, il est prêt à faire des compromis tant que la trajectoire budgétaire est respectée », explique sobrement un conseiller.

Plus explosif encore, depuis des semaines, le mouvement de blocage prévu le 10 septembre, baptisé « Tout bloquer », qui conteste les coupes budgétaires, prend de l’ampleur sur les réseaux, mais aussi dans le débat politique. Jean-Luc Mélenchon et plusieurs responsables LFI ont ainsi apporté leur soutien ce dimanche à l’appel. Les confédérations syndicales ont, pour leur part, rendez-vous le 1er septembre pour discuter des actions à mener à la suite des annonces de François Bayrou.

Recours au 49.3

Pendant cette période mouvementée, le premier ministre sera tout de même contraint de rendre ses derniers arbitrages sur le budget. Les articles du budget doivent être envoyés au Conseil d’État à partir de la fin août, puis le texte doit être présenté pour avis au Haut Conseil des finances publiques, un organe de la Cour des comptes, avant son dépôt au Parlement début octobre.

Le gouvernement devra trouver le trou de souris pour faire passer le PLF 2026 - et le projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) - en évitant, si possible, la censure. Le scénario idéal pour le gouvernement serait, bien sûr, de parvenir à convaincre un groupe d’opposition de voter le texte. Mais, compte tenu du morcellement politique de l’Assemblée, cela semble impossible. Plus vraisemblablement, le premier ministre pourrait tenter de faire passer son budget par 49.3 - comme cela se fait depuis 2022.

Pour le budget 2025, le gouvernement Barnier avait choisi de laisser s’étirer le parcours parlementaire. L’une des motivations du précédent premier ministre était sans doute d’utiliser cette période pour négocier avec les oppositions afin d’échapper à la censure. On sait désormais que la méthode n’avait pas porté ses fruits et avait conduit le pays à débuter l’année 2025 sans budget.

La menace d’une motion de censure plane toujours

François Bayrou pourrait au contraire choisir d’adopter la stratégie inverse : engager dès l’arrivée du texte à l’Assemblée la responsabilité de son gouvernement, pour couper court au débat. Selon les textes budgétaires, cela pourrait se produire avant la fin du mois d’octobre. À noter que, même s’il n’était pas censuré à ce moment-là, le gouvernement devrait de nouveau faire usage de ce fameux article de la Constitution pour faire passer le texte lors de la deuxième lecture au Palais Bourbon.

Autre possibilité : François Bayrou pourrait laisser les débats s’étirer (voire demander à ses troupes de déposer des amendements pour repousser le vote) afin que le délai de 70 jours, accordé aux parlementaires pour examiner le budget, soit dépassé. Les PLF et PLFSS pourraient ainsi être appliqués par ordonnances à la mi-décembre. Dans l’état des forces politiques, une telle manœuvre du premier ministre mènerait sans doute à une censure des oppositions. Reste que, même après la chute du gouvernement, le budget serait « passé », contrairement au cas d’une censure sur 49.3.