Patrick Martin arrive à Matignon lors d'une réunion avec le Premier ministre Michel Barnier à l'hôtel de Matignon, à Paris, le 24 septembre 2024. © Paoloni Jeremy / Paoloni Jeremy/ABACA

Entreprises

Alors que le gouvernement envisage de taxer les entreprises, Patrick Martin met en garde contre une «potion qui relève du poison». Et formule ses propres pistes pour remettre les comptes publics d’équerre.

Le Figaro - 26 septembre 2024 - Par Julie Ruiz

 

Son ton plutôt conciliant en début de semaine en avait fait sursauter beaucoup dans les milieux patronaux. Alors que le premier ministre Michel Barnier a évoqué dimanche dernier des «prélèvements ciblés sur les personnes fortunées ou certaines grosses entreprises» pour contribuer à redresser les finances publiques, Patrick Martin, président du Medef, s’était dit «prêt à discuter» de ces augmentations d’impôts, avant d’être reçu mardi à Matignon. Ce jeudi, alors que les «pistes» de hausses fiscales sur les entreprises foisonnent, il a pris la plume pour écrire à ses adhérents afin de clarifier sa position vis-à-vis de l’élaboration du budget pour l’année prochaine.

Dans un contexte où le déficit public pourrait dépasser les 6% du PIB d’ici la fin de l’année, le «patron des patrons» renouvelle l’expression de son inquiétude. «Parce que les entreprises seraient les premières victimes d'une crise budgétaire qui se transformerait en crise économique et sociale dévastatrice aux conséquences dramatiques, j'ai échangé avec le premier ministre sur les voies et moyens permettant d'éviter cette crise», écrit-il dans cette missive que le Figaro a pu consulter.

«Le gouvernement semble esquisser un plan d'économie de 21 milliards d'euros», poursuit Patrick Martin. Pour lui, des hausses d’impôts de cette ampleur seraient une «potion qui relève du poison» avec «incontestablement un effet dévastateur sur la compétitivité des entreprises, sur la croissance et l'emploi». Pire encore, selon le représentant du principal syndicat patronal, «notre pays qui n'a jamais été autant fracturé, autant surveillé par les marchés, autant instable politiquement ne pourrait supporter une telle estocade, ça lui serait fatal».

30 milliards d’économies

Pour éviter un tel scénario, il recommande au gouvernement de «faire des économies massives, structurelles et immédiates sur ses dépenses courantes avant de céder à la facilité d'augmenter ses recettes par la pression fiscale» . Ne s’étant pas tout à fait départi de son esprit constructif, Patrick Martin propose dans sa lettre un plan d’économies de 30 milliards d’euros sur la dépense publique. Il indique d’ailleurs avoir parlé au premier ministre de certaines de ces pistes qui «participeraient à enrayer la spirale de la dépense publique sans mettre à genoux l'économie !»

S’appuyant sur les calculs du Haut Conseil du financement de la protection sociale, Patrick Martin souligne que le gouvernement pourrait faire 13 milliards d’euros d’économies en luttant mieux contre la fraude sociale - en particulier sur les cotisations sociales. Il propose également de restructurer et d’alléger l’organisation des 438 opérateurs de l’État, comme Pôle emploi, France Compétences ou les agences de l’eau, permettant de récupérer, à terme, jusqu’à 3 milliards d’euros. La «transformation digitale des administrations publiques et numérisation de toutes les procédures administratives» pourrait quant à elle générer jusqu’à 12 milliards d’économies. Le renforcement du contrôle de l’absentéisme dans le secteur public serait un moyen de dégager jusqu’à 2,9 milliards d’euros, selon les calculs du Medef. Patrick Martin appelle également de ses vœux la réforme du régime social des travailleurs frontaliers qui ne cotisent pas en France mais sont pris en charge par le régime qui permettrait d’économiser 800 millions d’euros, selon l’Unedic.

Enfin, «la surréglementation coûte à la France 60 milliards d'euros», selon l’OCDE, fustige le président du Medef. Et de conclure que «simplifier drastiquement la vie des entrepreneurs, des Français, comme les Allemands ont pu le faire en économisant au passage 12 milliards, est prioritaire !»