Politique

Alors que la gauche se divise sur l’identité d’un éventuel Premier ministre, le groupe présidé par Laurent Wauquiez veut mettre sur la table une dizaine de textes législatifs avant la coupure estivale.

L'Opinion - 15 juillet 2024 - Par Christine Ollivier

Laurent Wauquiez appuie sur l’accélérateur. Alors que le Nouveau Front populaire se divise sur l’identité d’un potentiel Premier ministre de gauche et que les macronistes se déchirent, le nouveau président des députés de La Droite républicaine (DR) veut prendre tout ce petit monde de vitesse. Pour cela, il veut finaliser avant la trêve estivale le « pacte législatif » qu’il a mis sur la table après son élection à la tête du groupe, mercredi dernier.

« Il faut, très rapidement, montrer notre capacité à prendre des initiatives dans l’intérêt de notre pays, sans pour autant dévier de notre ligne », écrivait-il vendredi dans un message adressé aux 44 députés DR.

L’objectif est triple. D’abord, s’afficher aux yeux des Français comme une force porteuse de propositions concrètes, sur le pouvoir d’achat ou la sécurité en particulier, quand les autres partis s’empêtrent dans les tractations autour d’une éventuelle coalition. Ensuite, tenter de revenir au centre du jeu en poussant les autres groupes de l’Assemblée nationale à se positionner sur ces propositions.

 

Coalition. Enfin, éviter de répondre à la question qui fâche à droite : celle de la participation à une éventuelle coalition gouvernementale avec Ensemble, dont Laurent Wauquiez, les yeux tournés vers 2027, ne veut pas entendre parler. Dès lors, pour ne pas être accusé de bloquer le pays, « on affiche la couleur sur le fond et on ne demande pas de postes, résume le député du Val-de-Marne, Vincent Jeanbrun. On n’est pas dans la tambouille, mais on est prêt à discuter avec des gens qui ne seraient pas choqués par nos propositions ».

Après avoir multiplié les entretiens téléphoniques individuels, vendredi et samedi, avec ses troupes, Laurent Wauquiez leur a soumis lundi matin, lors d’un débat d’une heure et demie en visioconférence, l’ébauche d’un « pacte législatif d’urgence nationale », comprenant une dizaine de textes législatifs. «Quatre propositions prioritaires » en seront extraites pour « débloquer la France dans les 100 jours », précise le député de Haute-Loire dans Le Figaro.

« Nous représentons une droite responsable, toujours prête à voter les lois qui vont dans l’intérêt de la France », est-il écrit dans le document de travail que s’est procuré l’Opinion. A le lire, cette « droite responsable » n’est pour l’heure pas une droite de compromis. Le projet de « pacte législatif » reprend en effet les grandes lignes du programme défendu par Les Républicains ces dernières années, y compris dans ses points les moins consensuels.

Laurent Wauquiez propose ainsi de reprendre, dans une proposition de loi, les dispositions du projet de loi sur l’immigration censurées en janvier par le Conseil constitutionnel, portant sur l’instauration de quotas annuels d’immigration, le conditionnement des aides sociales à une durée de présence sur le territoire et le remplacement de l’AME par une Aide médicale d’urgence. Au risque de provoquer une poussée d’urticaire à gauche et chez les macronistes.

La droite fixe sans surprise deux « lignes rouges »: « aucune augmentation d’impôt, ni baisse des pensions »

Choc d’autorité. Sur le terrain de la sécurité, il préconise « un choc d’autorité ». Au menu : « refonte du Code de la justice pénale des mineurs », retour des peines plancher, limitation des réductions et aménagements de peine, et « plan d’urgence de construction de nouvelles places de prison ». La Droite républicaine préconise aussi de « suspendre les aides sociales pour les délinquants et les parents de délinquants mineurs ».

Sur le terrain économique, la droite fixe sans surprise deux « lignes rouges » : « aucune augmentation d’impôt, ni baisse des pensions ». Sa priorité affichée est surtout de défendre « la France qui travaille », alors que l’inflation s’est imposée pendant la campagne comme la préoccupation numéro un des Français. Pour cela, les députés de droite prônent une « augmentation réelle et durable du pouvoir d’achat » fondée sur « la valorisation du travail » et « la création de richesses par les entreprises » plutôt que « l’assistanat » et « des chèques financés à crédit ».

D’une part, ils veulent ainsi « fusionner les aides sociales en une aide sociale unique conditionnée à des heures d’activités d’intérêt général et plafonnée par rapport au smic » et réformer l’assurance-chômage « pour empêcher les abus ». D’autre part, ils proposent de « défiscaliser et désocialiser entièrement les heures supplémentaires et le rachat de RTT » et « de relancer l’intéressement, la participation et l’actionnariat salarié en supprimant le forfait social ».

En matière de maîtrise des finances publiques, La Droite républicaine veut « appliquer la règle d’or », imposant un budget en équilibre, sur le modèle allemand, et promet de présenter « un ambitieux plan d’économies » à l’occasion de la prochaine loi de finances, à l‘automne.

ZAN. Sur le terrain de l’écologie, le projet de « pacte législatif » évoque la taxation des importations polluantes, le développement du nucléaire et la suppression du « zéro artificialisation nette » (ZAN), auquel Laurent Wauquiez s’était opposé dans sa région Auvergne-Rhône-Alpes. Outre une « loi pour la refondation de l’école » aux contours encore flous, un autre texte, plus consensuel, porterait sur « l’accès à la santé » et viserait à « supprimer réellement le numerus clausus », « mettre en place une quatrième année d’internat en médecine générale dans les déserts médicaux » et « exonérer fiscalement la poursuite des activités médicales des médecins à la retraite ».

Les auteurs de ce document de travail l’assurent : « Ces mesures d’urgence nationale sont à même de rassembler une majorité de Français dans l’intérêt de la France ». Les députés DR doivent se retrouver mercredi pour continuer à en débattre et éventuellement amender ces propositions. Restera ensuite à savoir comment les autres groupes de l’Assemblée nationale les accueilleront.