« Mon credo, c'est la contagion du bonheur, chez Big Mamma et dans ma vie » assure Tigrane Seydoux, CEO de Big Mamma. (DR)

Portrait

Pour Tigrane Seydoux, le CEO de Big Mamma, avril 2025 est à marquer d'une pierre blanche : il célèbre les dix ans de son groupe de restauration et l'ouverture, à Barcelone, d'un 28e établissement.

LesEchos - 18 avril 2025 - Par Claude Vincent

En ce matin d'avril, l'ambiance est joyeuse à la pizzeria Popolare. Accolades et rires animent le restaurant, près de la Bourse de Paris. « Un joyeux bazar à l'italienne au coeur du concept de Big Mamma », souligne Tigrane Seydoux, cocréateur de l'enseigne en 2015 avec Victor Lugger.

Visiblement, ça marche. Pour ses dix ans, Big Mamma peaufine le petit dernier à Barcelone, 28e restaurant d'un groupe présent dans 7 pays, et dont le fonds londonnien McWin est désormais l'actionnaire majoritaire. Pour le CEO Tigrane Seydoux (depuis Londres, Victor Lugger dirige aujourd'hui Sunday, une solution de paiement créée par les deux acolytes), cette dimension humaine est fondamentale.

« Mon credo, c'est la contagion du bonheur, chez Big Mamma et dans ma vie. Je pousse ça : mixité sociale, joie, accueil, exigence mais bienveillance envers soi et les autres, détaille Tigrane Seydoux. La croissance, ce n'est pas que la course aux ouvertures, cela permet à chacun de grandir. Vous pouvez démarrer plongeur et vite devenir chef. Notre slogan, c'est 'change people's lives with pizza'. »

L'amour de l'Italie

Issu d'une longue lignée familiale active dans la finance, l'industrie, la diplomatie et le cinéma, Tigrane Seydoux, né à Monaco, passe les premières années de sa vie en principauté. Son père, Jacques Seydoux, est alors directeur de la Société des bains de mer. « J'ai appris l'italien et plongé dans cette culture très tôt. J'ai développé un très fort attachement à ce pays, nous nous sommes même mariés en Sicile avec mon épouse », confesse ce néo-quadra - il est né fin 1984 - qui parle haut et ponctue ses phrases avec les bras et les mains.

Toute ma vie je me suis positionné comme 'capitaine', dans la famille ou la vie professionnelle.

Tigrane Seydoux, cocréateur de Big Mamma

Monté à Paris vers six ans, dans le quartier de l'Odéon, il poursuit un « super parcours », dit-il, au lycée Henri IV. Mais plutôt que d'y faire sa prépa, il opte pour l'internat au lycée Sainte-Geneviève, à Versailles. Une façon de prendre du recul, à 18 ans, après le décès d'une mère qui a lutté onze ans contre un cancer et le départ du père. Dernier de la fratrie - cinq frères et une soeur - il se sent pourtant responsable de la famille. « Toute ma vie je me suis positionné comme 'capitaine', dans la famille ou la vie professionnelle. »

Admis à HEC, il y rencontrera son épouse « solaire, une fabricante de bonheur » qui, après 11 ans chez L'Oréal, est devenue psychothérapeute et a cofondé la plateforme Iamstrong dédiée à la santé mentale des ados et des jeunes adultes. Puis, à 22 ans, nouveau drame pour Tigrane Seydoux avec le suicide d'un frère de 32 ans, diplomate. « Je ne suis pas du genre à faire dans le pathos, j'affronte la vie avec une bonne dose de résilience, je vois toujours le verre à moitié plein. Mais ces deux décès ont impacté ma vie et mes choix », reconnaît-il.

Crêpier sans lendemain

Pour l'aider à couper, un ami d'enfance l'embarque dans un tour du monde - 9 mois et 18 pays - quasi initiatique. Il en revient avec une maxime : « Faire de sa vie ce qu'on a envie d'en faire, ce qu'on a envie d'être. » En 2009, il tape à la porte de Stéphane Courbit, qui monte Lov Group, et après quelques mois dans sa start-up Betclic à Londres, il revient à Paris comme son bras droit. « Victor et moi étions de la même promo d'HEC mais on ne se connaissait pas. Nous nous sommes croisés via Lov Goup, il était directeur de MyMajorCompany. Nous avons vite été en phase et ça dure depuis 12 ans » se souvient Tigrane Seydoux.

La suite fait partie de la légende : leur formation sans lendemain de crêpiers à Brest, les premiers temps de Big Mamma, la réussite du concept, son extension… Avec toujours en tête une priorité : la famille. « C'est la chose la plus importante pour moi, elle est le bonheur sur Terre, jamais je ne la sacrifierai pour Big Mamma », assure ce père de trois enfants de 3, 6 et 8 ans.

A Madrid, où il réside depuis cinq ans - car « pour ouvrir un pays, il faut y vivre » - son « kif » est d'aller randonner dans la Sierra. Et demain ? « Viser le grand international nous amènera sûrement à bouger, mais mon épouse et moi sommes en permanence en action. Il faut toujours être ambitieux et conforme à ses valeurs. Je me bats corps et âme pour rester dans cette ligne. »

Claude Vincent