
Entretien
Avec Mémoricide, il caracole en tête des ventes de livres. À 75 ans, le vicomte qui pensait terminer sa vie en paria se trouve adoubé par une partie de la France. Nous sommes allés le voir dans sa Vendée natale.
Le Figaro Magazine - 7 février 2025 - Par Charles Jaigu (texte) et Olivier Coret (photos), pour Le Figaro Magazine
Il pleut des hallebardes, ce lundi gris de janvier. La terre est détrempée, l’herbe verte, et l’on serpente dans le bocage vendéen vers une façade de vieilles pierres qui ouvre sur la cour intérieure d’un manoir sans apprêts. Philippe de Villiers en a fait l’acquisition il y a plus de trente ans avec son épouse, Dominique. Des joies, des peines, une vie de gentilhomme bretteur. Sept enfants, dont le troisième, Nicolas, a pris la suite du Puy du Fou. Deux de ses quatre filles sont entrées dans les ordres. Comme jadis. Tout ici respire la France d’avant, sauf peut-être les pompes à chaleur. Dans la salle à manger, une photo montre Soljenitsyne assis à la table des Villiers. Le starets y séjourna en 1993 pour dénoncer le massacre des Vendéens par les troupes jacobines. Les révolutions nationales ou communistes nous l’ont appris : pour tout changer, il faut tuer sans compter. « Ce fut le premier génocide de l’histoire, plus personne ne le conteste aujourd’hui, même si les chiffres sont difficiles à établir, il y eut entre 300.000 et 600.000 morts », martèle Villiers à propos du combat de sa vie pour la reconnaissance du drame vendéen.
Par la fenêtre, le regard suit l’alignement des vignes – il y en a en Vendée… – qui grimpent en pente douce jusqu’au point haut d’une colline. De là, on peut voir, à vol d’oiseau, le Puy du Fou. Aujourd’hui, le vicomte a 75 ans, les cheveux gris clair. Son œil plissé en arquebusière ne perd jamais un micron de la scène qu’il observe. Sa chevalière au doigt lui a valu les lazzis. Il rappelle, dans son dernier livre, Mémoricide, pourquoi il la porte. Ses ancêtres normands et lorrains ont plusieurs fois payé « le prix du sang ». Il en est fier.
Conteur au coin du feu
Très longtemps avant que la France se peuple de Français d’origine musulmane prompts à se plaindre de leur sort, elle avait en son sein des provinces qui s’estimaient incomprises et méprisées. « J’ai grandi à quelques kilomètres d’ici, dans le bas bocage, on parlait patois, et notre professeur nous disait : “la Vendée, c’est la Lozère, plus la mer”. À l’ENA, venir de Vendée c’était être un moins que rien », appuie-t-il, sur l’air de Bécassine. Son bureau se trouve dans une grange aménagée. Sur des feuilles cartonnées dressées comme autant de petits drapeaux, on lit à chaque fois un mot-clé. Des articles découpés fourbiront ses arguments pour commenter l’actualité dans la prochaine émission de CNews.
Chaque mot est la touche d’un clavier – grandes orgues ou piano – qui lance une note familière. Dans les graves, ça résonne immigration, Europe, guerre d’Ukraine, démographie, Ve République ; dans les aigus, on entend éducation, culture, tradition, et aussi le chardonneret de son enfance, l’enclume du maréchal-ferrant et l’angélus de l’église campagnarde. Tout est allégorie dans la tête de ce croisé de la France perdue. Tout est légende. Ce mot, en latin, signifie ceci : ce qui doit être dit. L’histoire de France, celle des savants, peut se lire aussi comme un roman. Et dans ce roman, on trouve de tout, jusqu’au tropisme oriental de la France. Aussi bien Saint Louis à Tunis qu’Abd el-Kader à Amboise. Il reste que, dans une époque aussi infusée au second degré que la nôtre, ce premier degré passe mal.
Il devance Emmanuel Macron dans le classement des cent personnalités préférées des Français
Philippe de Villiers n’en a jamais eu cure. Il a été, il est, le conteur d’une nostalgie. Son dernier livre a dépassé ce mois-ci les 200.000 exemplaires vendus. Il a coiffé au poteau le livre de Jordan Bardella. Le jeune espoir du RN fait, chez le même éditeur, 170.000 ventes. Le tout dans un contexte éditorial morose, ce qui souligne l’exploit. Quant à son émission hebdomadaire, elle a atteint le million de téléspectateurs sur CNews. Elle a remplacé celle de son ami Éric Zemmour qui, lui, s’y attelait trois fois par semaine. Mais quand Zemmour personnifiait le Français assimilé, Villiers est le vicomte millénaire. « Il est même revenu dans le classement Ifop pour le JDD des cent personnalités préférées des Français, à la soixante-dixième place. Peut-être que ce qu’ils aiment chez lui, c’est qu’il ne fait plus de politique », nous dit un sondeur. Le côté patriarche au coin du feu ? Ses nostalgies remontent loin, à l’unisson de la paysannerie française et catholique qui fut la sève de la vieille nation. La sève n’est plus là. La faute à qui ? On pourrait répondre mille choses. Le cours du monde. Le progrès que la France a elle-même voulu et inventé.
Le compliment de Le Pen
L’ancien tribun a, lui, des réponses toutes prêtes. Avec sa voix qui saute et qu’il module comme un autre Bourvil, il accuse et il se lamente. Tout est « la faute à Monnet ». Le raccourci complotiste est facile. Le consentement du général de Gaulle à la construction européenne est soigneusement mis de côté. Tant pis, la nuance n’est pas son fort. Ce combat est-il celui d’hier ? Éric Zemmour l’admet : « Le souverainisme des années 1990 n’est plus mon combat, j’ai dit pendant ma campagne que c’était à l’intérieur de l’UE qu’il fallait se battre. » Et Philippe de Villiers est trop fin analyste pour ne pas voir que les opinions européennes sont furieusement dextrogyres.
Alors, Villiers en fait-il trop ? Peut-être pas. Car en face il y a les bataillons de l’histoire pénitentielle, décoloniale, ou globale. Et il y a le nouvel « Homo Zapiens », incapable d’écouter plus de quelques minutes. La chanson douce de la France des clochers, des claires-voies, des haies, des métiers de père en fils, des voisinages d’entraides, des morts qu’on enterre, auxquels on rend un culte, tout cela a été englouti dans le brouhaha des villes noctambules qui s’abreuvent des séries Netflix. L’exode rural d’hier a pris une dimension planétaire. ça fiche le vertige. Oui, il faut donner de la voix. Ce qu’il fait.
Il a trouvé sa place, juste à côté de la politique. Il est le conteur des nostalgies françaises
Pas snob, Philippe de Villiers n’invoque pas parmi ses sources littéraires le Lys dans la vallée et le Capitaine Fracasse, mais plutôt Jacques Anquetil et Raymond Kopa, dont il nous montre les photos découpées dans un album d’enfance. Pourtant il y a des points communs entre Fracasse, le saltimbanque de Mont-de-Marsan sorti des rêves de Théophile Gautier, et le créateur du Puy du Fou. Pour le premier spectacle du Puy, en 1978, l’énarque de la promotion Mendès-France a appris à cracher du feu, car personne ne savait le faire dans la petite troupe d’acteurs de fortune qu’il avait recrutée. Il nous raconte comment un membre du public qui le savait directeur de cabinet du préfet de Charente-Maritime prit la plume pour le portraiturer en sous-préfet saltimbanque dans la revue Vie publique,« cette Pravda du fonctionnaire ». Ça faisait tache.
Jacques Chirac, dont il avait été le stagiaire en Corrèze et qui l’avait pris en affection, le sauva de la colère dudit préfet, en lui offrant d’être son chef de cabinet à Paris, ce qu’il refusa – trop loin du Puy. À son tour, Giscard d’Estaing l’invita à l’Élysée. Le jeune aristocrate vendéen eut l’heur de séduire le descendant putatif de Louis XV : « On me dit que vous crachez du feu ? » lui lança-t-il dans un chuintement amusé. Villiers nous le narre avec force accents et détails, comme il l’a fait dans ses Mémoires, Le moment est venu de dire ce que j’ai vu… Pas de doute, il est un irrésistible conteur de lui-même et pas seulement de la France. Il devrait monter sur scène en solo. Philippe Caubère serait épaté. Cette évidence, c’est Jean-Marie Le Pen qui la lui a dite la seule fois où ils se sont rencontrés. On nous rapporte que ce fut lors d’un dîner à Moscou, chez un ami peintre des deux hommes, en catimini. C’était il y a plus de vingt ans. À l’époque, Villiers volait les voix au Front national, ce qui aidait ses amis de droite. On ne pouvait se parler que discrètement. Le Pen dit à Villiers : « Au fond, vous n’êtes pas fait pour la politique, vous êtes un homme de spectacle. »
Des guignols... aux JO
Le spectacle, mais lequel ? Philippe de Villiers est entré en politique quand elle cessait d’être prise au sérieux. Les ambitieux seraient désormais ciblés par les juges et moqués quotidiennement par les marionnettes des Guignols de l’info (1988-2018). Villiers a échappé aux premiers, mais pas aux seconds. « À Nîmes un soir, je croise en me rendant à un meeting de mon mouvement un couple qui crache sur mon passage. Je leur demande pourquoi ; ils me répondent : “Vous avez dit que les Arabes il fallait les jeter à l’eau avec une bouée, je croyais que vous étiez quelqu’un d’humain”. Je dis à mon directeur de cabinet : C’est quoi cette histoire ? Il fait son enquête et il me dit “C’est ta marionnette dans les Guignols…” » Jacques Chirac fut aidé par sa marionnette lors de la présidentielle de 1995, mais Villiers la détesta.
L’éternel préjugé antiaristocratique que nous a légué la Révolution. « Les Guignols ont été un moment très violent pour lui. Le mauvais esprit, la gaudriole, la moquerie font partie de l’histoire de France, mais cela passait par le texte, par les chansons, par des spectacles qui se déroulaient devant une assistance limitée. Avec la télévision, la dérision est devenue un produit audiovisuel de masse », analyse Lorrain de Saint Affrique, qui a fréquenté Villiers à cette époque, après sa rupture avec Jean-Marie Le Pen, et qui confirme le malaise. Bien plus tard, Vincent Bolloré, nouveau propriétaire de Canal+, confia à Villiers, qui nous le raconte : « J’ai arrêté les Guignols à cause de vous. » Le patron breton a décidé de changer le ton de la politique française. Sans doute a-t-il médité la phrase de Patrick Buisson : « Le Puy du Fou est la seule bataille culturelle que la droite a gagnée. » On ne s’étonnera pas qu’il ait demandé à Villiers de reprendre le flambeau sur CNews.
Le Puy du Fou est la seule bataille culturelle que la droite a gagnée
Patrick Buisson
Il faut dire que la bataille de l’histoire et du spectacle de l’histoire reste un enjeu capital. Cet été le spectacle fluvial de l’ouverture des Jeux olympiques a été apprécié par 70 % de Français. Mais les 30 % qui ne l’ont pas aimé ne comptent pas pour rien, surtout quand le reste du monde n’y a rien compris. Transgression, dérision, déconstruction ont été les mots d’ordre de ce récit fluvial qui a allumé la colère de Philippe de Villiers. Patrick Boucheron, le nouveau commissaire politique de l’histoire dite globale, s’était mis en tête d’offrir à quatre milliards de téléspectateurs incrédules un jeu de massacre qu’il présenta comme « un anti-Puy du Fou ». Une autre figure de l’histoire connectée, l’Indien Sanjay Subrahmanyam, a récemment comparé Boucheron, dans Le Figaro, à un « petit caïd ».
Il est en effet devenu la grande figure de l’académo-militantisme dont s’honore aujourd’hui le Collège de France. Quelques séquences bien envoyées n’ont hélas pas effacé cette image nihiliste d’une reine décapitée, d’une dérision de la Cène, etc. Qui, à l’autre bout du monde, s’intéresse à Gisèle Halimi ? De tout cela, Villiers s’indigne dans Mémoricide. « Son émission est importante parce qu’il met en perspective les enjeux dans une histoire du temps long. Toute sa vie a été de répondre à l’oubli et la déconstruction par un acte de transmission, afin de réconcilier les Français avec la force de leur histoire », nous dit le député européen François-Xavier Bellamy, dont il est proche.
Hier Villiers se battait contre une histoire de France trop longtemps racontée par les amis de la Révolution. Aujourd’hui, le présentisme règne, et une bonne dose de je-m’en-foutisme a renvoyé la France en note de bas de page. En quelques années, la frise héroïque des batailles et des grands hommes s’est effacée. Désormais, les deux seuls éléments des programmes que l’on retrouve à tous les niveaux d’enseignement sont la Révolution française (version droits de l’homme) et la Seconde Guerre mondiale.
Brève Mascotte de Macron
À ces affadissements, Villiers répond par des spectacles qui héroïsent la France et l’Europe. « Il est notre Walt Disney », nous dit Éric Zemmour à propos de son ami de longue date, qui fut son compagnon de route pendant la campagne présidentielle de 2022. Certes, avec 2,4 millions de visiteurs chaque année, il est encore loin des 11 millions de Disneyland. « Nous avons fait ça sans la moindre subvention publique, à 400 kilomètres de Paris », objecte Villiers. Ces dernières années, la prouesse a été saluée depuis Los Angeles, qui lui a remis plusieurs prix. Soudain, « les chromos surannés » du Puy du Fou, moqués par Patrick Boucheron, prennent une autre couleur.
« Par ma généalogie et par mon instinct, j’ai senti enfant que le premier droit de l’homme, c’est le droit à la continuité historique. J’ai voulu embrasser les poilus de 14, le drapeau de Bonaparte à Arcole, rêver avec Du Guesclin, Bayard, Clovis, et même les soldats de l’An II. Mon compagnon de route, c’est Ernest Lavisse. » Le maître des manuels de la IIIe République a écrit : « Avant la Révolution il y avait un fédérateur qui était le Saint chrême, c’est fini. Il faut qu’on trouve un fédérateur de substitution, et ce sera un récit légendé. Et il faudra chercher dans ce récit ceux qui ont touché au Saint chrême : Clovis, Jeanne d’Arc ! »
Emmanuel Macron ? Je souhaite qu’il s’en aille
Sans doute est-ce ce qu’avait deviné Emmanuel Macron quand il décida de s’inviter au spectacle du Puy du Fou en 2016, avant la présidentielle. Qui était ce Macron, ministre de Hollande, et prêt à toutes les transgressions, au point d’aller au Puy du Fou ? Pas dupe, le rebelle du bocage a vu ce qu’il pouvait en tirer, lui aussi. Cela le désenclavait du pré carré conservateur dans lequel il a été enfermé. Il accueillit volontiers le ministre. Il faut dire qu’Emmanuel Macron fit ce qu’il fallait. « Après le spectacle, Emmanuel descend dans la salle de presse, la larme à l’œil. Il s’arrête, prend sa respiration. Et il lâche “Je suis venu chercher ici l’écho profond des ferveurs françaises et je l’ai trouvé.” » On était au sommet du « en même temps ». D’un côté Villiers, de l’autre Boucheron. Le roman national et la déconstruction de celui-ci.
En plusieurs occasions, le jeune ministre mitraille de questions l’aristo blanchi sous le harnais. « Qu’est-ce que le prochain président devrait faire ? » lui demande-t-il. « Habiter le corps du roi. Le mystère », lui répond Villiers. « Écoute-le ! approuve Brigitte. » Le jour de son élection, on vit le jeune président marcher avec solennité devant la pyramide du Louvre.
Réconciliateur des droites ?
Pour habiter ce corps royal, encore fallait-il être légitime. Philippe de Villiers était de ceux qui pensaient que François Fillon avait été victime d’un coup d’État judiciaire. Macron avait profité de l’occasion. « De temps en temps, il m’appelait. Un jour je suis resté une heure et demie au téléphone. Je me suis aperçu que ça ne servait à rien. » Enfin, les deux hommes finirent par rompre, au moment des Gilets Jaunes. « Il m’invite pour dîner à l’Elysée et je me retrouve devant un plateau de fruits de mer. Je lui dis “il vous manque des crabes comme ça, dans votre gouvernement, pour vous”. Et puis on s’est engueulés sur la PMA. Je lui dis “Ça vous distrait des vrais problèmes. L’immigration, c’est le problème numéro un. Vous ne vous occupez pas des Français. Vous êtes dans votre petit cercle”. Il s’est fâché. Moi aussi. » Et maintenant ? « Je souhaite qu’il s’en aille ; on ne peut pas attendre. Aucune solution de remplacement n’est parfaite. Mais il faut d’urgence en finir avec l’immigration. »
En finir, mais comment ? Les dernières pages de son livre laissent planer l’hypothèse de la guerre civile entre « la France créolisée et la France des traditions ». Placée entre les deux, « la France ubérisée » serait, estime-t-il, obligée de choisir son camp. La guerre civile ? « L’envisager, c’est la provoquer. Je refoule au fond de ma pensée les mauvaises pensées », nous répond-il. Pourtant, sur CNews, il n’hésite pas à décrire la profanation de la tombe de Jean-Marie Le Pen comme « un acte de guerre civile » venu de l’extrême gauche – autrement dit, en langage villiériste, du « parti de l’étranger », au service des intérêts islamistes.
Mais l’apocalypse n’est pas toujours sûre. Les élections, en démocratie, servent à trancher les crises politiques.. À rompre, si possible, les accords algériens de 1968. Il veut croire que ce sera le cas après le départ d’Emmanuel Macron, si la droite nationale populiste obtient la victoire. « Je me suis donné pour mission d’unir les droites. Pourquoi ? Parce que tous les autres le font dans tous les pays. Et parce que le moment en France est venu d’y réfléchir sérieusement. Chacun pris isolément ne peut pas y arriver. J’ai des bonnes relations avec Marine Le Pen, et je connais bien son entourage proche. Marion Maréchal, aussi, je l’aime beaucoup. Quant à Éric, c’est un ami. Ils me regardent tous le vendredi soir. Le jour venu j’essaierai d’être utile. Je suis dans la phase de la gratuité absolue. J’ai 75 ans. J’ai eu les lauriers. Je ne cours pas après la couronne d’épines. »
Ne pas abandonner
Est-il besoin de souligner que les personnalités qu’il nomme dans cette conversation ne se parlent pas. Pire, ne se supportent pas. « Marine Le Pen ne voudra jamais de l’union des droites, elle est de gauche », nous glisse Éric Zemmour, lequel a, par ailleurs, été trahi en rase campagne par Marion Maréchal. Il y a donc encore un peu de chemin à parcourir. Est-il besoin d’ajouter que les dernières élections législatives ont montré que le Front républicain restait un ressort puissant de la vie politique française ? Ce qui déporte le regard du côté de la vieille droite de gouvernement, aussi réticulaire soit-elle. Celle qui fut la sienne. « Dans le groupe LR, Laurent Wauquiez est un bon ami, on se parle, François-Xavier Bellamy aussi, et naturellement le ministre de l’Intérieur, Bruno Retailleau . » Il nous montre la photo de Retailleau jeune homme, à cheval qu’il a accroché dans son deuxième bureau, au Puy du Fou. On voit le futur ministre au trot pendant la répétition d’un spectacle. Après quinze ans de brouille, les deux hommes se sont réconciliés. Ils étaient ensemble sur les pontons des Sables-d’Olonne à l’arrivée de Charlie Dalin, le vainqueur du Vendée Globe. Pour justifier cette accolade entre deux complices de vingt ans, Philippe de Villiers, capitaine Fracasse de la politique française, récite une phrase de Roland Dorgelès : « Tout pareil aux étangs transparents dont l’eau limpide dort sur un lit de bourbe, le cœur de l’homme filtre les souvenirs et ne garde que les beaux jours. »
Jeter la rancune à la rivière, mais pas abandonner le combat. Après tout le vendéen Clemenceau a gagné 1918. À chacun sa guerre. Villiers l’a gagnée sur ses terres. Cette petite nation chouanne était du mauvais côté de l’Histoire. Il a fait voir la Vendée martyre par le Puy du Fou. Mais il a aussi créé le Vendée Globe : « la course à l’infini, le risque absolu, la conquête du monde ». Vendéen, c’était la honte. Aujourd’hui, c’est un modèle français. Aujourd’hui, c’est cool.
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