Sylvain Maillard, député EPR de Paris. - Sipa press

Finances publiques

« Le projet de loi de finances pour 2025 examiné actuellement au Parlement apparaît à rebours du sens de l’histoire, sans prise avec les bouleversements géopolitiques et économiques que l’élection américaine vient d’acter »

L'Opinion - 7 novembre 2024 - Par Sylvain Maillard et neuf députés EPR

En politique comme dans les affaires, timing is everything. Or, l'élection américaine qui a consacré le retour tonitruant de Donald Trump à la présidence des Etats-Unis risque bien de provoquer une accélération de l’histoire. Pour les Américains mais aussi pour les Européens.

Avec une administration MAGA (Make America Great Again), la primauté du made in America risque de s’imposer plus fortement que jamais. Il n’y a qu’à scruter les propositions économiques du président élu, dont l’une des mesures phares est une vaste baisse d’impôts pour les entreprises, avec un impôt sur les sociétés qui pourrait descendre jusqu’à 15 %.

Bien plus, il est à prévoir que les subventions en faveur de l’industrie seront massivement accrues et favoriseront d’autant plus la production américaine que le coût de l’énergie, aux Etats-Unis, est sensiblement moindre qu’en Europe. Un niveau bas qui s’accentuerait encore avec une dérégulation massive des secteurs pétrolier et gazier. Sans parler du zèle avec lequel Trump entend réinstaurer des droits de douane prohibitifs pour tous les produits étrangers, y compris européens, avec un taux allant de 10 % à 20 %.

Tandis que les Etats-Unis baissent les impôts, nous, nous les augmenterions, alors que la part des prélèvements obligatoires dans le PIB français est déjà à 48 %, la plus haute des pays de l’OCDE ?

Fossé. Une telle politique économique risque de mettre à mal l’ensemble des projets européens de réindustrialisation initiés ces dernières années et d’accroître encore le fossé entre nos économies, alors que le PIB par habitant de la zone euro était à peine égal, en 2022, à 70,6 % de celui des Etats-Unis !

Face à cette nouvelle donne, la réponse des Européens et des Français ne peut être en demi-teinte. Dans un monde multipolarisé, avec un marché américain plus concurrentiel que jamais, notre seule option est dans l’ambition et le volontarisme. Or, le projet de loi de finances pour 2025 examiné actuellement au Parlement apparaît à rebours du sens de l’histoire, sans prise avec les bouleversements géopolitiques et économiques que l’élection américaine vient d’acter. En remettant en cause la politique de l’offre et la stabilité fiscale instaurées depuis sept ans, il risque de compromettre ce qui a permis à la France de faire reculer durablement le chômage et de s’ériger comme le pays d’Europe le plus attractif pour les investisseurs étrangers.

Tandis que les Etats-Unis baissent les impôts, nous, nous les augmenterions, alors que la part des prélèvements obligatoires dans le PIB français est déjà à 48 %, la plus haute des pays de l’OCDE ? Tandis qu’outre-Atlantique, on promeut les champions économiques nationaux, nous, nous menacerions la survie de nos fleurons, avec une surtaxe de l’IS jusqu’à 35 % ? La solution pour assainir nos finances publiques sans grever la croissance ne résidera jamais dans des hausses d’impôts, comme le réclament à cor et à cri les oppositions de gauche, mais dans de véritables réformes structurelles, à l’instar de celle de l’assurance-chômage.

C’est à ce prix que nous pourrons rester compétitifs, avec une réglementation plus lisible, des dépenses sociales maîtrisées, des procédures administratives simplifiées, des politiques de travail modernisées. Cet impératif de compétitivité s’impose d’ailleurs à toute l’Europe, comme l’illustre l’implosion de la coalition tricolore en Allemagne sur le budget. Ironiquement, le jour même de l'élection de Trump, qui n’a cessé de viser l’industrie automobile allemande. Laissant présager un retour au pouvoir de la CDU et d’une politique pro-business extrêmement agressive à nos frontières…

Timing is everything.

Sylvain Maillard, député de Paris ; Aurore Bergé, députée des Yvelines ; Brigitte Klinkert, députée du Haut-Rhin ; Mathieu Lefèvre, député du Val-de-Marne ; Nicolas Metzdorf, député de la Nouvelle-Calédonie ; Karl Olive, député des Yvelines ; Charles Rodwell, député des Yvelines ; Charles Sitzenstuhl, député du Bas-Rhin ; Caroline Yadan, député des Français de l'étranger ; Paul Midy, député de l’Essonne ; Laure Miller, députée de la Marne.