Le maire de Cannes, David Lisnard. © Bertrand GUAY / POOL / AFP

Tribune

David Lisnard fustige les « technocrates de Bercy » et leur « conformisme destructeur ». Pour le maire de Cannes et président de l’AMF, « il est urgent de rompre avec ces pratiques » et de laisser les collectivités « gérer librement pour des résultats concrets ».

Le JDD - 6 octobre 2024 - Par David Lisnard

J’ai pris connaissance des déclarations du ministre du budget, Laurent Saint-Martin, et de « son entourage ». À quelques jours du débat sur le projet de loi de finances, s’attaquer de la sorte à l’Association des Maires de France, de surcroît en m’accusant de « clientélisme », est une bien curieuse manière, qui frôle l’indécence et répond à une logique qui échappera à tous ceux qui pensent que le gouvernement pourrait se passer d’un tel conflit.

Plutôt que de chercher la division avec ceux qui sont au plus près du terrain, le gouvernement devrait se concentrer sur la manière de laisser travailler les collectivités, qui assument de plus en plus de contraintes imposées par l’État et de services à la place de celui-ci, et méritent d’être traitées avec respect.

"Le libéralisme place les individus en responsabilité."

Décidément, les techno populistes qui se succèdent à Bercy n’ont toujours rien compris. Ni à la façon de gérer les finances publiques, ni à celle de faire fonctionner une organisation en motivant ceux qui y travaillent, ni au libéralisme. Non, le libéralisme n’est pas synonyme de souffrance ou de rigueur stérile, il n’est pas l’autre nom du conformisme technocratique qui ne sait qu’ajouter de la dépense un jour et supprimer des postes un autre, tout en augmentant les impôts toujours. Le libéralisme place les individus en responsabilité. Donc il fait de la liberté d’être et d’action la matrice de la création, y compris de biens et de services.

C’est en cela qu’il concilie performance et dignité, le contraire de ce que pensent et font les collectivistes, qu’ils soient pseudo révolutionnaires à l’extrême gauche, étatistes de droite – et d’extrême-droite – ou de gauche, ou qu’ils se présentent en pères la rigueur, comme les petits hommes gris de Bercy. Le résultat est le même, ils font plonger le pays dans le déficit et le déclassement.

Que les technocrates qui dirigent le pays depuis trop longtemps cessent d’ajouter contraintes bureaucratiques, procédures obligatoires, normes absconses et missions inutiles, et toutes les fonctions publiques, d’État territoriale et hospitalière, feront mieux, avec des agents sur le terrain, correctement payés, pour moins cher.

Énarques bureaucrates

Le bureaucrate pénalise à la fois le contribuable, l’usager et le fonctionnaire opérationnel. Malheureusement, ce sont les énarques bureaucrates, qui n’ont jamais mené un projet, n’ont jamais pris un risque, n’ont jamais dirigé une entreprise ou une collectivité, qui nous gouvernent. Et en plus nous font la leçon.

J’invite le ministre et ses conseillers à faire un stage d’immersion dans les mairies de France et en PME. Ils constateront qu’il est possible d’avoir des résultats et d’éviter la dialectique destructrice entre laxisme dépensier et rabot technocratique.

Puisque dans cet article ils parlent de Cannes, puis me mettent en cause, le ministre et sa troupe m’amènent à indiquer que pour ma part j’ai toujours appliqué les principes de liberté et de responsabilité évoqués plus haut, aussi bien dans le privé que dans l’action publique locale. Et que cela marche plutôt bien, en tout cas bien mieux que ce que nous proposent depuis des années ceux qui nous jugent depuis leurs tours aveugles ministérielles.

Par exemple, quand j’étais le dirigeant de la société d’exploitation du palais des congrès de Cannes, nous l’avons avec mes équipes totalement désendettée et développée, jusqu’à en faire le premier centre de congrès de France. À la mairie, depuis 2014, malgré un taux de pauvreté à Cannes historiquement supérieur à la moyenne nationale (21 % contre 13,8 %), des catastrophes naturelles dévastatrices et coureuses, et des charges de centralité lourdes, nous avons réduit la dette communale de 71,5 millions d’euros, tout en augmentant nos investissements et en pratiquant la sobriété fiscale.

"Bercy préfère donner des sentences et s’obstiner dans les mesures de technocrates".

Comment ? Par une augmentation de la productivité des services, qui avec méthode a permis d’améliorer les conditions de travail des agents, de diminuer la dépense de fonctionnement et de multiplier par cinq la capacité d’autofinancement. Un cercle vertueux, basé sur une gestion rigoureuse, participative et pragmatique.