La présidente de la Commission européenne s'est exprimée à l'occasion de l'Italian Tech Week à Turin. (Reuters/Yves Herman)

Europe

La présidente de la Commission européenne a fait part de différentes initiatives pour inciter les entrepreneurs à rester sur le Vieux Continent. Parmi elles, un fonds et une harmonisation des règles.

Les Echos - 3 octobre 2025 - Par Charlie Perreau

« Voglio un'Europa alla vostra altezza. » Cette phrase a été prononcée ce vendredi par Ursula von der Leyen devant un parterre d'entrepreneurs et investisseurs réunis du 1er au 3 octobre à l'Italian Tech Week à Turin. La traduction - « je veux une Europe à votre hauteur » - résume bien le discours de la présidente de la Commission européenne.

« Nous ne pouvons pas accepter que nos plus grands talents partent pour s'épanouir. Vous devez trouver le bon terrain pour vous épanouir ici en Europe », a lancé la cheffe de l'exécutif européen, qui estime qu'il y a encore trop d'obstacles, à commencer par le manque de financement.

Pas de quoi surprendre l'audience puisque les start-up américaines ont toujours été mieux loties, en particulier quand elles ont besoin de lever plusieurs dizaines voire centaines de millions d'euros. « L'Europe ne manque pas de capitaux. L'épargne des ménages européens atteint près de 1.400 milliards d'euros. Ce qui nous manque, c'est le capital-risque », a martelé Ursula von der Leyen.

Harmoniser les règles

Pour réduire ce fossé, elle évoque la création d'un fonds « Scale-Up Europe » en partenariat avec des investisseurs privés qui fera des investissements directs en actions dans des secteurs stratégiques comme l'IA, le quantique ou encore les technologies propres. De quoi compléter un autre véhicule créé en 2022 et qui injecte des tickets dans des fonds de capital-risque de croissance (« growth ») qui investissent dans les scale-up.

La présidente de la Commission veut en finir avec la fragmentation du marché. Une start-up européenne a souvent moins de difficultés à se développer outre-Atlantique que chez son voisin. « Nous vivons à une époque où une ligne de code peut traverser le continent en une milliseconde tandis que la start-up derrière reste bloquée à la frontière », a lancé la cheffe de l'exécutif européen.

Et elle en a profité pour brandir la baguette de la « simplification » et la mise en place du 28e régime, un cadre juridique qui doit aider les jeunes entreprises innovantes à se développer facilement en Europe - normaliser les processus d'investissement, simplifier les opérations transfrontalières, numériser entièrement le processus de constitution d'une société… Une consultation publique sur le sujet vient de se terminer avec comme objectif une législation en 2026. « Parce que l'Europe est votre maison. Et vous devez vous sentir chez vous partout en Europe », a lancé Ursula von der Leyen à l'audience.

Miser sur l'IA « appliquée »

Pas de discours devant des entrepreneurs de la tech sans parler d'IA. « Les grandes entreprises européennes adoptent l'IA au même rythme que leurs homologues américaines. Mais les petites entreprises restent à la traîne », estime la dirigeante européenne, qui en a profité pour annoncer qu'une stratégie d'« IA appliquée » sera présentée la semaine prochaine.

Parmi les projets qui seront dévoilés : un réseau européen de centres de dépistage avancés alimentés par l'IA. « Cela se traduira par des soins de santé de premier ordre dans tous les coins de l'Europe avec des temps d'attente plus courts. Et nous inciterons les hôpitaux et les entreprises pharmaceutiques à adopter des solutions d'IA innovantes. Parce que l'IA peut sauver des vies. Et l'Europe doit montrer la voie. »

Autre secteur évoqué : l'automobile. Assez logique au vu de l'importance de cette industrie en Italie. « Les voitures autonomes sont déjà une réalité aux Etats-Unis et en Chine. Et la même chose devrait être vraie ici en Europe, a lancé la présidente de la Commission. Alors pourquoi ne mettons-nous pas en place un réseau de villes européennes où les premières voitures autonomes peuvent prendre la route ? Une coalition de 60 maires italiens a déjà exprimé son intérêt. Faisons-le. »

« La course n'en est qu'à ses débuts »

Ursula von der Leyen veut mettre fin au défaitisme autour de l'IA en Europe. « Les sceptiques disent que nous répéterons les erreurs du passé. Et qu'une autre génération de talents européens sera forcée de partir. Je ne suis pas d'accord. Non seulement parce que la course à l'IA n'en est qu'à ses débuts. Mais aussi parce que j'ai vu ce que les Européens peuvent faire », a déclaré la cheffe de l'exécutif face à une salle qui l'a applaudie.

Si l'Europe a des talents grâce à ses écoles et universités reconnues dans le monde et quelques chefs de file dont Mistral, elle reste bien loin derrière les Etats-Unis. Peu importe, la salle continue d'applaudir. « Combien de fois vous a-t-on dit que vous visiez trop haut ? Combien de fois avez-vous pensé qu'il n'y avait plus rien à essayer ? Et pourtant, vous êtes là. Non pas parce que vous n'avez jamais échoué, mais parce que vous avez toujours trouvé la force de reprendre la route. C'est l'esprit que je ressens dans cette salle. Et je veux que notre Union soit inspirée par vous. » Pas en mot, en revanche, sur l'IA Act.