L'ancien président de la République, Nicolas Sarkozy, répond aux questions du Figaro sur la situation nationale et internationale, dans son bureau parisien. François Bouchon / Le Figaro

Entretien

En retrait de la vie politique, l’ancien président de la République brise le silence dans un entretien accordé au Figaro.

Le Figaro - 30 mai 2024 - Par Arthur Berdah, Claire Conruyt, Philippe Gélie et Vincent Trémolet de Villers

LE FIGARO. - Êtes-vous inquiet de la situation en Nouvelle-Calédonie ?

Nicolas SARKOZY. - La violence en Nouvelle-Calédonie n'est pas nouvelle. Je suis impressionné par le nombre d'approximations assenées à propos de ce territoire auquel je suis très attaché ! Certains ont même parlé d'une «colonie». Mais je connais peu de colonies où ceux qui sont censés être «colonisés» dirigent le gouvernement local, le Congrès et deux Provinces sur trois... Et ont géré les richesses minières du nord. Ce, alors même qu'ils sont minoritaires, comme l'ont montré les résultats des trois consultations référendaires. Fait d'autant plus notable qu'avait été mise en œuvre une chose inédite dans l'histoire de la République : le gel du corps électoral, conçu pour donner un avantage clair aux indépendantistes. Malgré cela, par trois fois, les Calédoniens ont confirmé leur volonté de rester Français, alors que si un seul de ces référendums avait donné la victoire aux indépendantistes, le processus s'arrêtait et l'indépendance l'emportait. Ce territoire a donc manifesté une volonté constante de rester dans la France. Le rôle du président de la République n'est pas d'être à équidistance des loyalistes et des indépendantistes, mais d'affirmer très clairement qu'il est aux côtés de ceux qui veulent rester Français, tout en respectant et en dialoguant avec les indépendantistes.

À mes yeux, le débat est désormais clos, le processus a suivi son cours, il convient de confirmer le maintien de la Nouvelle-Calédonie dans la France, de dégeler le corps électoral, de faire appliquer la loi et évidemment de rétablir l'ordre. J'ai beaucoup fait pour la réconciliation des différentes communautés, notamment par la politique des deux drapeaux et en relançant les transferts de compétence, qui étaient au point mort quand je suis arrivé à l'Élysée. Pour le reste, prenons garde à ne pas surinterpréter politiquement ce qui relève du pillage, de la délinquance et de la criminalité. C'est malheureusement une tendance française : dès qu'il y a une explosion de violence, il faudrait l'excuser par des circonvolutions sociales, historiques ou culturelles qui ne sont jamais que l'expression d'une forme de démission.

Faut-il organiser un 4ème référendum, comme le propose Marine Le Pen ?

Cette proposition de Marine Le Pen, qui reviendrait à donner raison à ceux qui cassent et qui pillent, témoigne d'un manque d'expérience et de sang-froid. Cela serait faire un gigantesque bond en arrière.

Quel sursaut d'autorité faut-il face à l'explosion des violences ?

La violence, qu'une partie des élites françaises et de la classe politique et médiatique ont longtemps fait profession de nier, est désormais insupportable. L'explosion à laquelle on assiste est d'ailleurs moins celle des chiffres que celle de la colère d'un peuple français qui n'en peut plus de ce qu'il considère être un déni de réalité. En a-t-on pris conscience au plus haut niveau de l'État ? Je n'en suis pas certain, quelles que soient par ailleurs les qualités du ministre de l'Intérieur qui fait tout ce qu'il peut et qui le fait plutôt bien. Tant que l'insécurité ne sera pas considérée comme la première des priorités, on n'endiguera pas cette vague de colère. Lorsque nous étions au pouvoir, les chiffres sont incontestables, 2002 à 2011 furent 9 années consécutives de baisse de la délinquance. Ces chiffres ne sont bien évidemment pas les miens mais ceux de l'Observatoire national de la délinquance et de la réponse pénale. Je regrette d'ailleurs qu'on ne publie plus ces statistiques. Ces résultats de l'époque ne sont pas le fait d'un seul volontarisme politique, ils sont le fruit de mesures qui avaient prouvé leur efficacité comme les peines planchers ou encore la rétention de sûreté.

François Hollande et la gauche ont démantelé ce nouvel arsenal sécuritaire.
Il s'agit d'un authentique scandale d'État justifié par l'idéologie de la démission et de l'excuse.

Nicolas Sarkozy

Que s'est-il passé ensuite ? François Hollande et la gauche ont démantelé ce nouvel arsenal sécuritaire. Il s'agit d'un authentique scandale d'État justifié par l'idéologie de la démission et de l'excuse. Quant au sujet de la lutte contre l'immigration clandestine, se souvient-on des polémiques sur la politique de reconduite à la frontière que j'avais mise en place avec les «charters» ? Ceux qui ont attaqué cette politique hier sont mal placés aujourd'hui pour dénoncer la non mise en œuvre des OQTF.

L’exécutif vient d'annoncer un plan sur la justice et la délinquance des mineurs. Est-ce à la hauteur ?

Le gouvernement a compris que cela ne pouvait pas durer. C'est positif. Je rappelle que pendant la campagne pour la primaire de 2016, j'avais déjà proposé de ramener la majorité pénale de 18 à 16 ans. Cette prise de conscience - incarnée par le premier ministre - que la question des mineurs est essentielle va dans la bonne direction. Je souhaite un même mouvement sur la problématique des multirécidivistes et sur celle de l'immigration.

Considérez-vous qu'il existe un lien entre l'immigration et la délinquance ?

Qui peut sérieusement affirmer qu'il n'y en a pas ? Cela ne veut pas dire naturellement qu'un étranger est un délinquant. Mais bien sûr que le lien est évident. Le nombre des étrangers dans nos prisons et la part qu'ils prennent dans la délinquance en général sont sans appel. Le nier n'est rien d'autre qu'un nouveau déni de réalité.

La droite et le RN demandent un référendum sur l'immigration . Est-ce nécessaire ?

Je n'y suis pas opposé par principe, même s'il me semble difficile de répondre à cette problématique par oui ou par non. La vérité, c'est qu'on ne peut pas traiter de la politique migratoire sans évoquer la question européenne et celle de Schengen.

C'est-à-dire ?

Je n'ai pas de doute sur le fait qu'il faut mettre en commun nos compétences en Europe pour gérer nos frontières, c'est une affaire d'efficacité. Mais il faut un contrôle politique, une question si sensible ne peut reposer sur les seules épaules d'un commissaire européen que personne ne connaît et qui n'a de comptes à rendre à personne.

De la même manière que nous avons créé un gouvernement économique de la zone Euro, l'Ecofin, il faut créer un gouvernement politique de Schengen constitué des ministres de l'Intérieur qui éliraient en leur sein un président et auquel serait rattaché Frontex. La maîtrise de nos frontières deviendrait alors un sujet politique, assumé par des dirigeants politiques qui auraient à rendre des comptes à leurs électeurs.

C'est une idée qui devrait plaire à Emmanuel Macron...

Tant mieux ! Certaines idées plaisent à Emmanuel Macron, cela ne veut pas dire qu'il les adopte... Mais au-delà de la question des frontières, il faut repenser en profondeur le fonctionnement de l'Europe. Aujourd'hui, l'Europe ne peut plus être conjuguée au singulier. Il faut distinguer trois Europes. L'Europe de l'euro, qui doit aller vers un vrai gouvernement économique, avec davantage d'intégration, adossé au leadership de l'Allemagne et de la France. L'Europe de l'Union, c'est-à-dire du grand marché, qui doit redonner des compétences aux États-membres pour ne se concentrer que sur des grandes politiques stratégiques, et dans laquelle les prérogatives de la Commission européenne doivent être limitées pour qu'elle ne puisse plus édicter, seule et sans contrôle, autant de normes techniques et tatillonnes.

Enfin, il faut l'Europe de Schengen, avec son propre gouvernement et une maîtrise effective de ses frontières. Chacune de ces Europes doit avoir un mode de fonctionnement spécifique et des membres différents. Ce serait la seule façon de régler le problème de l'élargissement sans détruire l'identité et l'efficacité de l'Union européenne (UE).

Comment ?

Prenez l'exemple de l'Albanie qui est à deux kilomètres de Corfou ; difficile d'expliquer que ce n'est pas l'Europe ! Bien sûr, l'Albanie ne peut entrer pour l'instant dans l'Europe de l'euro et sans doute n'est-elle pas prête non plus à entrer dans l'Europe de l'Union. En revanche, il est dans notre intérêt de la placer dans l'Europe de Schengen car nous serions alors aux côtés des Albanais pour les aider à gérer et à contrôler leurs frontières. C'est une question d'efficacité.

Vous vous opposez donc à l'élargissement de l'Europe à l'Ukraine ?

Oui, cette obsession de l'élargissement est d'abord américaine. Parce que plus l'Europe s'élargit vers l'Est, plus elle affaiblit son autonomie en renforçant son tropisme américain. Par ailleurs, l'entrée de l'Ukraine dans l'UE ou dans l'Otan ne résoudrait en rien les problèmes actuels de ce pays avec la Russie. On peut parfaitement assurer la sécurité de l'Ukraine, par des garanties et des engagements internationaux très puissants, sans aller jusqu'à l'intégrer à l'Otan. De même, l'UE peut construire un partenariat fort avec l'Ukraine, qui ne soit pas une adhésion. Ne refaisons pas avec l'Ukraine l'erreur que nous avons commise avec la Turquie, en lui promettant une adhésion à l'UE à laquelle, au fond, personne n'a jamais cru. Je me suis opposé seul à l'entrée de cette dernière. Qui le regrette aujourd'hui ? Personne.

Emmanuel Macron explique que sans défaite de la Russie en Ukraine , il ne peut y avoir de sécurité en Europe. Et vous ?

L'Ukraine est un pont entre le monde slave et l'Europe. Sa vocation est de maintenir ce lien entre deux mondes qui ne se ressemblent pas mais qui doivent coexister. Car les pays ne changent pas d'adresse. L'Histoire n'est pas une page blanche : Kiev a été la première capitale de la Russie, les Ukrainiens et les Russes ont des siècles de vie en commun, il y a une dizaine de millions de russophones en Ukraine. Cela ne donne aucun droit à Vladimir Poutine de faire ce qu'il a fait et ne justifie en rien cette agression. Mais cela met la complexité de ce dossier en face de tous ceux qui voudraient l'expliquer de façon binaire et réductrice. Quand Vladimir Poutine a eu la très mauvaise idée d'envahir la Géorgie, j'étais alors président du Conseil européen. À la suite de discussions très dures, nous avons trouvé une solution qui a permis à la Géorgie de rester indépendante. C'est la preuve que l’on peut et que l'on doit discuter avec le président russe. Quant à l'envoi de troupes au sol, permettez-moi d'exprimer de sérieux doutes. Je ne peux me résoudre à voir le pays de Tolstoï et celui de Balzac entrer en guerre. A-t-on seulement réfléchi aux conséquences ?

Votre analyse, historique, ne semble pas influencée par le fait que cette guerre a creusé un fossé infranchissable entre les Ukrainiens et les Russes...

Si, pour que la guerre s'arrête, l’on attend que l'une des parties pose un genou à terre, il faut alors se préparer à une explosion aux conséquences dramatiques. Le monde danse au bord d'un volcan. Une maladresse, un énervement, une ambiguïté peuvent créer les conditions d'un déchaînement catastrophique. Il est plus que temps de commencer à discuter sérieusement. Comment créer les conditions d'un rapport apaisé entre la Russie et ses voisins ? Comment redonner aux européens le rôle de leader sur un continent qui est le leur ? Les seuls qui parlent vraiment, ce sont les Chinois et les Américains. On ne peut pas raisonner de manière binaire. Être fort avec Poutine, c'est prendre le risque de négocier directement, et fermement, avec lui, pas d'engager un engrenage guerrier aux conséquences incalculables.

Etes-vous de ceux qui s'inquiètent d'un retour de Donald Trump à la Maison-Blanche ?

Je me suis toujours méfié de ceux qui disaient qu'il fallait aimer l'Amérique d'Obama et détester l'Amérique de Bush. Un pays n'est pas réductible à la sympathie que l'on éprouve à l'endroit de son président. Les Américains choisiront qui ils veulent. Je ne suis pas un partisan de Donald Trump dont l'élégance intellectuelle et personnelle ne m'a pas, jusqu'à présent, sauté aux yeux. Mais le procès qui lui est fait est injuste : la politique de repliement des États-Unis sur eux-mêmes a commencé avec Barack Obama. «America first» : cette réalité était là avant Trump, et ne s'arrêtera pas s'il est battu. C'est un fait nouveau dont nous serions bien inspirés d'anticiper les conséquences en Europe.

Faut-il continuer à soutenir Benjamin Netanyahou compte tenu du 7-Octobre ? Ou faut-il faire pression sur Israël pour mettre fin à cette guerre à Gaza ?

Rappelons d'abord qu'Israël est un fait politique majeur, issu de la Shoah : on ne peut accepter qu'Israël soit menacé de disparition. Ensuite, ce qu'a fait le procureur de la Cour pénale internationale (CPI), en réclamant, le même jour et dans les mêmes termes, des mandats d'arrêts contre les dirigeants d'Israël et du Hamas, est une honte. Vous ne pouvez pas mettre sur le même plan le pogrom du 7 octobre, qui est l'œuvre de barbares et de terroristes, et les agissements, fussent-ils excessifs, d'un gouvernement démocratiquement élu. La guerre est toujours cruelle et affirmer qu'il peut ne pas y avoir de conséquences sur les civils, c'est ne pas la connaître. Les bombardements américains qui ont précédé le débarquement des Alliés sur les côtes françaises ont hélas fait nombre de victimes civiles. Cela ne doit pas nous empêcher d'exiger des Israéliens qu'ils fassent beaucoup plus pour respecter le droit humanitaire et la protection des civils. Mais je n'accepte pas que l'on renvoie dos-à-dos les dirigeants israéliens et les terroristes ! Pour le reste, vous pouvez prendre le problème par tous les bouts : il n'y a pas d'autre issue que la solution à deux États. Parce qu'elle est juste pour les Palestiniens. Et parce qu'elle est la seule véritable garantie de sécurité pour Israël.

La France doit-elle reconnaître un État palestinien ?

Je ne peux pas être d'accord avec une reconnaissance de l'État palestinien tant que l'ensemble des composantes palestiniennes n'aura pas accepté la reconnaissance de l'existence d'Israël.

«L'importation» du conflit en France s'est traduite par une explosion des actes antisémites ...

Il y a toujours eu de l'antisémitisme en France, l'affaire Dreyfus en témoigne, mais il a trop souvent été nié ou sous-estimé. Aujourd'hui, il se cache derrière l'antisionisme ou le décolonialisme. Il est nié d'une autre façon. L'antisémitisme ne s'explique pas, il doit être combattu. J'ajoute, et c'est peut-être cela le fond du problème, que dans nos sociétés occidentales, nous avons fini par ne plus croire en rien et à être sceptique sur tout. L'Europe repose sur ses racines judéo-chrétiennes, mais à force de prôner une vision déformée, restrictive et excluante de la laïcité, on a fini par oblitérer notre identité. Le sacré, l'âme, la transcendance... Tout ce qui nous dépasse et nous sublime est nécessaire à l'équilibre de nos sociétés. C'est sur ce terreau fragile que l'islamisme a prospéré. Notre pusillanimité est un puissant accélérateur pour nos adversaires.

Le terme «islamogauchisme» vous semble-t-il approprié pour qualifier Jean-Luc Mélenchon et les Insoumis ?

Là encore, il suffit de se replonger dans l'Histoire : rien ne change ! Depuis les maires communistes qui ont paupérisé les quartiers pour y maintenir leur électorat, jusqu'à la campagne de 2012 où François Hollande a été célébré avec quantité de drapeaux algériens place de la Bastille... Que feint-on de découvrir ? La gauche a toujours fait du communautarisme. Jean-Luc Mélenchon n'est ni le premier, ni le dernier.

La France a-t-elle, par dogmatisme, perdu trop de temps sur le nucléaire ?

L'une des plus grandes «fake news» de ces 20 dernières années, c'est Fukushima. Là où 19.000 personnes ont été victimes du raz-de-marée, une seule est morte d'irradiation. Les écologistes et les socialistes ont expliqué à l'époque la fermeture de Fessenheim par Fukushima : craignaient-ils donc un raz-de-marée sur le Rhin ? L'affaire du nucléaire est un autre scandale d'État, et hommage soit rendu au président Macron d'y avoir mis un terme. Je me réjouis que l'EPR de Flamanville, que j'avais décidé avec celui de Penly, puisse enfin rentrer en service.

Que vous inspire le projet de loi sur l'aide à mourir ?

J'ai beaucoup de mal à me faire une idée définitive. La vie est si précieuse que, dans mon esprit et selon mes convictions, nul n'a le droit d'y mettre un terme pour des raisons de commodité. À l'inverse, quand la vie n'est plus la vie, submergée par la souffrance, il faut pouvoir y mettre fin. Mais tout ne peut pas être réglé par la loi. Il existe une zone grise intime où trois parties doivent avoir un dialogue profond, sensible et humain : le malade, sa famille la plus proche et le médecin. Ce moment précis doit-il être administrativement normé, règlementé, codé ? Je ne le crois pas. Par ailleurs, je reste convaincu qu'un effort particulier doit être engagé en faveur des centres de soins palliatifs à qui j'avais réservé ma première visite en tant que président de la République en 2007. Les professionnels qui y exercent sont admirables, précieux, fondamentaux.

Avez-vous choisi pour qui vous voterez aux européennes ?

Même si mon engagement européen est connu, je ne suis plus dans la vie politique partisane. Aussi, j'irai voter le 9 juin, sans rendre public mon choix. J'ai beaucoup de sympathie pour François-Xavier Bellamy et je compte des amis sur sa liste, mais je ne cache pas les divergences que j'ai avec certains des dirigeants actuels des Républicains. Ils oublient que la droite, si elle ne se rassemble pas, ne peut pas gagner. Le rétrécissement de notre famille est un contresens politique autant qu'historique. Je ne peux m'y résoudre.

Les Républicains sont un parti de gouvernement. Ils ne se tromperaient pas en faisant le choix de la France.

Nicolas Sarkozy

Depuis la présidentielle de 2022, vous appelez la droite à passer un «accord» avec Emmanuel Macron…

J'ai toujours considéré que le rôle d'un ancien chef de l'État n'était pas de rajouter une crise politique à toutes les autres. J'ai des rapports cordiaux avec Emmanuel Macron. J'aime échanger avec lui. Est-ce à dire que je suis d'accord avec tout ce qu'il a fait ? Non. Pour autant, je continue de penser que ma famille politique ferait mieux d'utiliser son influence réelle pour que le président soit plus en harmonie avec la matrice politique actuelle de nos concitoyens, lui dont la tentation naturelle est sans doute d'aller vers le centre-gauche. Les Républicains sont un parti de gouvernement. Ils ne se tromperaient pas en faisant le choix de la France.

La nomination de Gabriel Attal à Matignon rend-elle possible une coalition ?

En tout cas, cela ne la complique pas. J'aime la politique quand elle est épique et quand elle porte une vision. Ce qui n'est pas la caractéristique de l'époque. Mais vous ne me verrez jamais critiquer l'émergence de nouveaux talents. Or, Gabriel Attal est incontestablement de ceux-là, comme Gérald Darmanin ou Laurent Wauquiez. À sa manière, Jordan Bardella aussi, même si j'ai toujours combattu la famille politique à laquelle il appartient.

Emmanuel Macron a récemment critiqué la limitation à deux mandats présidentiels successifs née de votre révision constitutionnelle de 2008...

La révision constitutionnelle de 2008 est sans nul doute, avec celle de 1962, la plus grande réforme de la Constitution qui a été réalisée. C'est l'une des choses à laquelle je suis le plus attaché dans mon bilan. Dix ans, c'est déjà très long. Et d'ailleurs, concernant Emmanuel Macron, même s'il avait eu la possibilité de se représenter en 2027, je ne suis pas certain que je lui aurais conseillé de le faire... Pour le reste, il a le droit d'avoir ses convictions. Ce qui vaut pour l'un vaut pour l'autre.