Entretien

La députée LR de l’Aube, qui s’attend à une censure prochaine du gouvernement, encourage le chef de l’État à renommer dans la foulée Michel Barnier et à conserver tous les membres de l’exécutif, quitte à «faire fi de la décision des députés».

Le Figaro - 20 novembre 2024 - Par Wally Bordas

LE FIGARO.- Le RN et la gauche menacent d’une motion de censure le gouvernement. Le risque est-il selon vous élevé que le premier ministre tombe avant Noël ?

Valérie BAZIN-MALGRAS.- Oui, Michel Barnier et son gouvernement ont de fortes chances de tomber, à moins que certains socialistes ne se mettent à réfléchir, ce qui relèverait presque de la magie. Les oppositions ont le pouvoir de renverser ce gouvernement avant Noël, elles ne vont sûrement pas s’en priver. Mais ce serait totalement irresponsable et insensé, d’autant que le Rassemblement national et la gauche n’ont rien en commun et n’ont donc rien à proposer d’alternatif.

Le RN est dans une stratégie mortifère. Il veut le chaos dans notre pays en déstabilisant nos institutions. Mais la vérité, c’est qu’aujourd’hui, si 11 millions de Français ont voté pour Marine Le Pen et ses députés, ils ont largement dit non à son projet pour le pays lors du second tour des législatives anticipées. Pareil pour la gauche, qui aboie plus fort dans l’Hémicycle mais n’est pas plus en situation de construire la moindre majorité alternative.

Si le gouvernement tombait, quelle serait selon vous la meilleure solution pour Emmanuel Macron ?

Le président de la République ne doit pas en faire une affaire d’État. Il a tout intérêt à faire fi de la décision des députés. Il ne doit faire qu’une formalité de cette motion de censure en renommant immédiatement Michel Barnier premier ministre qui pourrait ainsi à son tour renommer tout de suite le même gouvernement. «Vous avez censuré ? Merci, au revoir. On tourne la page et on continue.» La France ne peut pas se permettre d’être à l’arrêt. Nous avons déjà vécu une dissolution, allons nous accepter de passer des semaines à voir le défilé des premiers ministres sur le perron de Matignon ? Ou devoir de nouveau dissoudre l’Assemblée à plusieurs reprises d’ici la prochaine présidentielle ? Ce serait accepter l’inacceptable.

La France n’a plus de temps à perdre, les chantiers sont trop grands. Nous devons avancer sur de très nombreux sujets, le pouvoir d’achat, l’insécurité, l’immigration, la dette, l’agriculture… Avançons !

Mais la gauche comme le RN crieraient au scandale. Et le gouvernement risquerait de retomber dans la foulée. Comment envisager une coalition plus solide ?

Tant que les socialistes ne le voudront pas, il n’y aura pas de majorité plus solide. Et ils crieront au scandale. Nous ne sommes pas là pour faire plaisir aux extrêmes mais pour travailler pour les Français. Avec la dissolution de l’Assemblée, Emmanuel Macron a voulu remettre de l’ordre au Parlement. Mais c’est pire qu’avant. Désormais, il faut avancer. Toutes les motions de censure vont être votées puisque les oppositions sont majoritaires. Mais nous sommes la minorité la moins minoritaire alors travaillons, tentons de donner une vision différente de la politique, avançons de manière responsable. Ne nous ridiculisons pas aux yeux de l’Europe et du monde en étant dans l’immobilisme ou en acceptant que des gouvernements tombent tous les trois mois.