Lors du scrutin de second tour des élections municipales, à Paris, en juin 2020. Jean-Christophe MARMARA/Le Figaro

Municipales

En vue de 2026, les macronistes veulent réparer l’«anomalie» du scrutin, avec le soutien du maire de Marseille et de la droite parisienne.

Le Figaro - 13 novembre 2023 - Par Loic Boichot

Pour la première fois depuis la polémique sur sa visite à Nouméa et à Papeete, Anne Hidalgo retrouve ce mardi les élus de son Conseil de Paris. Critiquée par ses oppositions, la maire socialiste de la capitale maintient toujours le flou sur ses intentions pour les élections municipales de 2026. Mais si elle décide de briguer sa succession, elle devra peut-être se soumettre à de nouvelles règles du jeu, tout comme les candidats de Marseille et de Lyon.

Plus de quarante ans après la loi Paris-Lyon-Marseille (PLM), les députés macronistes veulent revenir dès l’année prochaine sur l’«anomalie» du mode d’élection dans ces trois villes. Accusé d’être trop complexe, celui-ci prévoit que les deux millions d’électeurs concernés ne votent pas à l’échelle de leur commune, mais à l’échelle de leur secteur ou de leur arrondissement. Première conséquence, jugée illisible: les personnalités élues à la tête des mairies «centrales» - Anne Hidalgo à Paris, l’ex-socialiste Benoît Payan à Marseille, le Vert Grégory Doucet à Lyon - ne sont formellement candidates que dans une petite partie de leur ville.

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Deuxième effet potentiel, considéré comme antidémocratique: puisque la priorité est de conquérir des secteurs, il est possible de remporter la mairie… avec moins de voix au total que le camp adverse. Comme Gaston Defferre à Marseille en 1983. «Il faut régler ce déficit démocratique pour redonner aux électeurs l’intérêt d’aller voter», estime le chef de file des députés Renaissance, Sylvain Maillard, élu à Paris.

Son objectif, observé avec bienveillance par Emmanuel Macron, est de déposer une proposition de loi en décembre. Avant de la faire adopter par le Parlement l’année prochaine. En pratique, deux bulletins et deux urnes pourraient être nécessaires: l’un pour la mairie de secteur ou d’arrondissement, l’autre pour la mairie «centrale».

Ce n’est pas un problème démocratique. Chaque Parisien qui vote sait parfaitement pour quel maire il met son bulletin dans l’urne

L’entourage d’Anne Hidalgo

Objet d’une consultation lancée lundi par les Jeunes avec Macron, l’initiative est soutenue par le maire de Marseille, Benoît Payan. «Cela ne devrait même pas faire débat, explique-t-il dans un entretien au Figaro. Il est tout à fait légitime que les trois plus grandes villes de France entrent dans le droit commun.» L’élu est encore traumatisé par ses sueurs froides de 2020: arrivée largement en tête dans les urnes, la gauche unie a failli ne pas accéder à la tête de l’Hôtel de ville à cause de la logique des secteurs. À Paris, la chef de la droite parisienne, Rachida Dati, évoque un «enjeu démocratique». Elle en a parlé en octobre au chef de l’État.

Mais ce projet est contesté par sa rivale Anne Hidalgo. «Ce n’est pas un problème démocratique, avance l’entourage de la socialiste. Chaque Parisien qui vote sait parfaitement pour quel maire il met son bulletin dans l’urne.» Reviennent aussi des soupçons de visées électoralistes, partagés à Lyon par Grégory Doucet. «On est ouvert au débat, tout en pointant du doigt l’objectif poursuivi», dit son cabinet. Selon une étude du Figaro réalisée à partir des scores de 2020 - dynamiques de campagne et éventuelles alliances mises à part -, les vainqueurs n’auraient pas changé avec une révision du mode de scrutin. Ils auraient même bénéficié de majorités plus larges.

«Maire de l’Est parisien»

En niant toute manœuvre, les partisans d’une réforme plaident pour un système plus égalitaire. Selon eux, l’un des vices actuels est que les candidats concentrent d’abord leurs efforts sur la conquête de secteurs clés - souvent les plus peuplés, car les plus pourvoyeurs de sièges -, plutôt que sur la recherche d’une majorité d’électeurs. «Ils ont intérêt à ne s’adresser qu’à une partie de leur ville, déplore le député (Renaissance) David Amiel, chargé d’écrire la proposition de loi. Comme aux États-Unis (où les électeurs votent par État pour des «grands électeurs»), cela crée des fractures très fortes.» Ce qui fait dire à Sylvain Maillard qu’«Anne Hidalgo est d’abord la maire de l’Est parisien». Derrière la bataille des nouvelles règles du jeu, la campagne a déjà commencé.