Énergies
Futurs énergétiques 2050 : les scénarios de mix de production à l’étude permettant d’atteindre la neutralité carbone à l’horizon 2050
QUEL SYSTÈME ÉLECTRIQUE POUR SORTIR DES ÉNERGIES FOSSILES ET ÊTRE NEUTRE EN CARBONE EN 2050 ?
En 2019, RTE a lancé une large étude sur l’évolution du système électrique intitulée « Futurs énergétiques 2050 ». Cette étude implique une démarche inédite en matière de concertation et de transparence impliquant les parties prenantes intéressées à tous les stades de construction des scénarios, jusqu’à la publication de leur analyse complète à l’automne 2021.
Source : RTE - RTE est le gestionnaire du Réseau de Transport d’Electricité français.
Les principales étapes de ce processus comprennent :
- A partir de mi-2019 : Le lancement du processus de concertation organisé en neuf groupes de travail thématiques a réuni plus d’une centaine d’organismes et institutions.
- le 27 janvier 2021 : la publication du rapport conjoint entre RTE et l’Agence internationale de l’énergie, intitulé « Conditions et prérequis en matière de faisabilité technique pour un système électrique avec une forte proportion d’énergies renouvelables à l’horizon 2050 ». Le rapport définit les conditions techniques à remplir et liste des priorités pour la suite du programme d’étude.
- de janvier à juin 2021 : l’ouverture de la consultation publique sur les futurs scénarios, qui comprend une première description des scénarios et de leurs principales variantes, la description de la grille d’analyse qui leur sera appliquée et les hypothèses principales qui seront utilisées dans l’étude. 4 000 réponses provenant d’institutions, de collectifs ou de particuliers ont été récoltées.
- Le 8 juin 2021 : la publication du rapport d’étape de l’étude sur l’évolution du système électrique intitulée « Futurs énergétiques 2050 ». Cette première phase de l’étude a été achevée au premier trimestre 2021. Elle a permis de déterminer les principaux scénarios à étudier selon quatre axes d’analyses : technique, économique, environnemental et d’impact sur les modes de vie.
Neutralité carbone en 2050 : des scénarios contrastés à l’étude
Cette consultation a conduit à la stabilisation des scénarios de production et de consommation électriques permettant l’atteinte de la neutralité carbone à l’horizon 2050. Ces scénarios présentent des traits communs : la diminution de la consommation finale d’énergie, l’augmentation de la part d’électricité, une forte croissance des énergies renouvelables dans la production d’électricité. Ils décrivent en revanche des évolutions contrastées pour la filière électronucléaire ainsi que pour la part, à terme, des énergies renouvelables (EnR) dans le mix électrique.
Les enseignements de l’étude
Atteindre la neutralité carbone implique une transformation de l’économie et des modes de vie, et une restructuration du système permettant à l’électricité de remplacer les énergies fossiles comme principale énergie du pays.
Sur la consommation
- 1) Agir sur la consommation grâce à l’efficacité énergétique, voire la sobriété est indispensable pour atteindre les objectifs climatiques ;
- 2) La consommation d’énergie va baisser mais celle d’électricité va augmenter pour se substituer aux énergies fossiles ;
- 3) Accélérer la réindustrialisation du pays, en électrifiant les procédés, augmente la consommation d’électricité mais réduit l’empreinte carbone de la France ;
Sur la transformation du mix électrique
- 4) Atteindre la neutralité carbone est impossible sans un développement significatif des énergies renouvelables ;
- 5) Se passer de nouveaux réacteurs nucléaires implique des rythmes de développement des énergies renouvelables plus rapides que ceux des pays européens les plus dynamiques ;
Sur l’économie
- 6) Construire de nouveaux réacteurs nucléaires est pertinent du point de vue économique, a fortiori quand cela permet de conserver un parc d’une quarantaine de GW en 2050 (nucléaire existant et nouveau nucléaire) ;
- 7) Les énergies renouvelables électriques sont devenues des solutions compétitives. Cela est d’autant plus marqué dans le cas de grands parcs solaires et éoliens à terre et en mer ;
- 8) Les moyens de pilotage dont le système a besoin pour garantir la sécurité d’approvisionnement sont très différents selon les scénarios. Il y a un intérêt économique à accroître le pilotage de la consommation, à développer des interconnexions et du stockage hydraulique, ainsi qu’à installer des batteries pour accompagner le solaire. Au-delà, le besoin de construire de nouvelles centrales thermiques assises sur des stocks de gaz décarbonés (dont l’hydrogène) est important si la relance du nucléaire est minimale et il devient massif – donc coûteux - si l’on tend vers 100% renouvelables ;
- 9) Dans tous les scénarios, les réseaux électriques doivent être rapidement redimensionnés pour rendre possible la transition énergétique ;
Sur la technologie
- 10) Créer un « système hydrogène bas-carbone » performant est un atout pour décarboner certains secteurs difficiles à électrifier, et une nécessité dans les scénarios à très fort développement en renouvelables pour stocker l’énergie ;
- 11) Les scénarios à très hautes parts d’énergies renouvelables, ou celui nécessitant la prolongation des réacteurs nucléaires existants au-delà de 60 ans, impliquent des paris technologiques lourds pour être au rendez-vous de la neutralité carbone en 2050 ;
- 12) La transformation du système électrique doit intégrer dès à présent les conséquences probables du changement climatique, notamment sur les ressources en eau, les vagues de chaleur ou les régimes de vent ;
Sur l’espace et l’environnement
- 13) Le développement des énergies renouvelables soulève un enjeu d’occupation de l’espace et de limitation des usages. Il peut s’intensifier sans exercer de pression excessive sur l’artificialisation des sols, mais doit se poursuivre dans chaque territoire en s’attachant à la préservation du cadre de vie ;
- 14) Même en intégrant le bilan carbone complet des infrastructures sur l’ensemble de
leur cycle de vie, l’électricité en France restera très largement décarbonée et contribuera fortement à l’atteinte de la neutralité carbone en se substituant aux énergies fossiles ; - 15) L’économie de la transition énergétique peut générer des tensions sur l’approvisionnement en ressources minérales, particulièrement pour certains métaux, qu’il sera nécessaire d’anticiper ;
Généraux
- 16) Pour 2050, le système électrique de la neutralité carbone peut être atteint à un coût maîtrisable pour la France ;
- 17) Pour 2030 : développer les énergies renouvelables matures le plus rapidement possible et prolonger les réacteurs nucléaires existants dans une logique de maximisation de la production bas-carbone augmente les chances d’atteindre la cible du nouveau paquet européen « -55% net » ;
- 18) Quel que soit le scénario choisi, il y a urgence à se mobiliser.
10 000 personnes ont été interrogées à ces fins. 10 000 personnes représentatives de la population française. 10 000 personnes afin de voir dans quelle mesure la France est unie ou en dissonance. Dans quelle mesure pouvons-nous être une Nation se retrouvant sur l’essentiel ou portant des regards divergents ? Dans quelle mesure pouvons-nous parler d’une ou de plusieurs France ? 10 000 personnes permettant de disposer de caractérisations suffisamment fines pour aller plus loin que les variables d’analyse habituelles. Valeurs, rapport au progrès, situation de la France, inquiétudes… autant de thèmes abordés en profondeur. En quelques lignes, qu’en retenir ?
Que retenir de cette étude ?
« La France est en colère » peut-on entendre ou lire fréquemment. Est-ce si vrai ? S’il s’agit de l’état d’esprit caractérisant un tiers de la population française, aucune catégorie ne se définit prioritairement de la sorte. Car c’est l’inquiétude qui correspond le plus à ce que ressentent nos compatriotes. 53% des Français indiquent en effet être inquiets. Quel est le « portrait type » des personnes les plus inquiètes ? Une femme (58% inquiètes), âgée de plus de 65 ans (64%), ne disposant pas du bac (57%) politiquement à droite sur l’échiquier politique (61%), estimant qu’il lui est difficile de s’en sortir avec ses revenus (58%) et qu’elle n’est pas bien considérée par la société française (61%). Si cette inquiétude est nette, certaines populations expriment un sentiment différent. Ainsi les plus jeunes qualifient plutôt leur état d’esprit par la détermination (45%). D’une manière plus globale, observons que 76% des jeunes mobilisent des termes à connotation positive contre seuls 40% des personnes âgées de 65 ans et plus.
Comment qualifier l’inquiétude ? Pas uniquement par des aspects conjoncturels. En effet, la pandémie n’est que la 6ème source d’inquiétude citée (76%). Le dérèglement climatique, l’avenir de ses enfants, le terrorisme, la délinquance ou encore les inégalités suscitent les craintes de plus de 8 Français sur 10. On le voit, les appréhensions ne sont pas uniquement le fait de préoccupations d’ordre personnelles mais également collectives. A titre illustratif, observons que la question des inégalités sociales n’est pas uniquement évoquée par les personnes les plus défavorisées, loin s’en faut. Tout se passe comme si l’idéal que l’on se fait de la société française dépassait sa propre condition. Et que les inquiétudes renvoyaient à des questions de justice sociale et de perspectives collectives.
Sur les 18 enjeux d’avenir soumis au jugement des Français, tous apparaissent importants pour au moins 3 Français sur 4. C’est dire l’ampleur de la tâche pour les gouvernants. La hiérarchie des priorités est lourde d’enseignements : comme c’est le cas depuis la fin des années soixante-dix, le chômage arrive en tête des sujets prioritaires (92%). Loin de refléter une préoccupation individualiste (ainsi les retraités y sont plus sensibles que les actifs) cet enjeu constitue un sujet de société. Comme c’est le cas depuis de nombreuses années, la lutte contre la délinquance est fortement mobilisée par les personnes interrogées (88% et 95% chez les personnes âgées de 65 ans et plus). Ce qui apparaît nouveau, c’est l’injonction à ne pas penser uniquement à l’instant mais également à préparer le moyen et le long terme. A ce titre, les Français évoquent l’investissement dans l’école et la formation tout comme dans la recherche comme des sujets prioritaires. La période Covid que nous venons de traverser n’appelle ainsi pas à se concentrer uniquement sur l’immédiat (pas même la réforme de notre système de santé) pas plus, d’ailleurs, qu’à envisager comme une priorité le remboursement de la dette publique.
La pandémie nous a changé. C’est vrai, mais pas pour tout le monde. La France se scinde en deux : 47% des Français pensent avoir changé, 53% estiment le contraire. Qui a le plus l’impression d’avoir changé ? les jeunes (66% des 18/24 ans), 53% des Franciliens ainsi que les personnes les plus diplômées (51%). Ce ne sont pas les traditionnelles variables sociologiques qui font le plus fluctuer les positions des personnes interrogées mais plutôt celles en rapport à l’activité professionnelle. Affirment ainsi avoir changé 55% des personnes indiquant que le travail occupe une place très importante dans leur vie (contre 34% pour qui cela occupe une place pas importante du tout), et la même proportion de ceux indiquant vouloir télétravailler plus par exemple. D’ailleurs on voit bien que ce qui a le plus changé c’est la place du travail dans sa vie (48% des actifs l’affirment), devant l’attention portée aux autres (44%), la place de la famille dans sa vie (44% également) plus que le regard porté sur les services publics (41%). Mais s’agit-il vraiment d’un changement ou n’est-ce pas plutôt l’accélération de processus qui étaient déjà en germe dans la société française ?
Comment bat le cœur des Français ? Il bat pour sa famille et pour ses proches en priorité. Il bat pour la liberté. Il bat aussi, et beaucoup, au rythme de la santé. Inquiets, les Français mobilisent souvent la famille comme horizon ou comme repère. Comme citoyens, la famille apparait être la deuxième valeur la plus importante à défendre juste après la liberté et devant la justice.
Les priorités à titre personnel ? Avoir plus de temps avec son entourage dont, inévitablement, sa famille. A l’avenir sur qui peut-on compter ? L’Etat ? Les amis que l’on s’est choisi ? Certes. Mais bien moins nettement que sa famille. Et que l’on ne vienne pas ici indiquer que ce terme refuge serait mobilisé par des personnes âgées et non les jeunes. Ainsi les jeunes de moins de 25 ans indiquent au même titre que les personnes âgées de 65 ans que la famille constitue l’aspect le plus important de leur vie.
Cette attitude s’inscrit dans un registre de forte critique à l’égard de ceux pouvant être les acteurs du ciment républicain. Dans un contexte où près d’un Français sur deux estime que la France est en déclin, trois acteurs sont « pointés du doigt » : les responsables politiques, l’administration et le système éducatif français. La République, dans ses entrailles, participe – aux yeux d’une majorité relative de Français – au déclin de notre pays. La critique est nette et sévère.
Les Français ont-ils pour autant renoncé au collectif ? Pas du tout. Ils sont prêts à se mobiliser pour des causes identifiées. Ont-ils perdu espoir ? Pas tout à fait : ils sont prêts à faire beaucoup d’efforts en faveur de l’environnement quand bien même ils pensent que ces actes seront inutiles sans action internationale concertée.
Sur qui compter en ces temps difficiles et incertains ? En ceux avec qui on peut avoir un contact direct et… que l’on connait. Il n’est pas ici question de puissance mais d’affinités : la famille (68%), loin – très loin – devant les amis (32%), le réseau professionnel (19%) ou encore l’Etat (15%), les entreprises (12%), collectivités locales voire associations (9% chacun). Une majorité de Français, quelle que soit sa catégorie, évoque en premier lieu la famille. Cadres comme ouvriers, urbains comme ruraux, électeurs de droite comme de gauche. Et même les jeunes : 63% des moins de 25 ans pensent à leur environnement familial pour mener à bien leurs projets bien plus qu’à leurs amis (40%). La France qui s’est construite autour de l’Etat et de ses déclinaisons – comme les collectivités locales – ne compte plus sur eux. Trop lourd, trop loin, pas assez souple, pas assez individualisé et… pas assez efficace pour apparaître comme un partenaire solide pour se projeter dans l’avenir.
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