JF Copé
«Nous avons manqué d’audace: il fallait tordre le bras à Macron en lui imposant une ligne plus à droite, notamment sur les questions de sécurité et de finances publiques», estime Jean-François Copé. ADRIEN GUILLOTEAU/Le Figaro

Politique

Pour le maire LR de Meaux (Seine-et-Marne), «la visibilité de la droite est horriblement compliquée».

Le Figaro - 28 juillet 2022 - Par Emmanuel Galiero

Jean-François Copé est maire LR de Meaux (Seine-et-Marne).

LE FIGARO. - Le poids de la droite au Parlement vous satisfait-il?

Jean-François COPÉ. - Les députés LR ont été héroïques de patience, de compétence et de responsabilité durant ces quatre semaines. Ils se montrent à la hauteur de ce que doit être un parti de gouvernement. Emmanuel Macron peut les remercier, car, sans LR, pas de majorité! C’est tout le paradoxe et le drame de cette situation: c’est un gain maximum pour le président de la République, mais, pour Les Républicains, j’ai beau chercher, je ne vois pas ce qui aux yeux des Français pourrait redorer le blason de la droite républicaine.

Pourquoi?

Parce que son combat est invisible. En réalité, l’équation est insoluble. Dans la posture qui a été imposée par la direction du parti LR, aucun visage ne peut émerger, car nous revendiquons de nous opposer tout en votant les textes. Cela n’est pas facile à suivre pour les Français.

Même la personnalité d’Olivier Marleix n’est pas identifiée, selon vous?

Si, bien sûr, de manière institutionnelle et il a fait avec sa vice-présidente, Michèle Tabarot, un sans-faute. Mais, ce qui fait la dynamique parlementaire, c’est l’émergence de personnalités identifiables. Or, dans un contexte dominé d’un côté par l’exécutif et de l’autre par des Insoumis haineux et des RN en cravate, la visibilité de la droite est horriblement compliquée. Nous sommes dans une situation hybride, coincés entre les deux partis extrémistes.

Pourquoi les LR ne pourraient-ils pas s’imposer comme une force crédible pour l’après-Macron?

Tout simplement parce que sous la Ve République, on se fait connaître par deux postures: soit en devenant un ministre important, soit en incarnant l’opposant numéro 1. Or, nous avons manqué d’audace: il fallait tordre le bras à Macron en lui imposant une ligne plus à droite, notamment sur les questions de sécurité et de finances publiques.

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Plutôt que quelques débauchages individuels sans grand impact politique, nous aurions pu ainsi lui imposer, en tant que deuxième force, huit à dix ministères clés pour montrer aux Français notre volonté de les servir, quitte à reprendre notre liberté en 2026 pour préparer 2027 ensuite. Et nous risquons de le payer très cher: les réformes faciles et populaires, consistant à offrir des cadeaux supplémentaires aux Français, seront votées par le PS et les réformes les plus compliquées, comme les retraites ou les économies budgétaires, seront votées par la droite! Donc, nous récolterons tous les inconvénients sans les avantages. Et Macron pourra encore faire illusion. Jusqu’au collapse.

Qui vous dit que Macron aurait accepté?

Si nous avions exigé un changement de ligne et s’il l’avait refusé, alors tous les torts auraient été pour lui. Et nous aurions eu beau jeu de lui rappeler son refus tous les jours.

Comment voyez-vous la suite?

À terme, cette situation est intenable. Intenable pour le gouvernement, qui sort épuisé de ce mois et qui, petit à petit, finira par renoncer à réformer, de guerre lasse, face aux hurlements et aux insultes de l’extrême gauche.

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D’ailleurs, la suppression de la session de septembre est la première preuve de ce renoncement. Cette position est également intenable pour Les Républicains, qui seront condamnés à n’être qu’un parti charnière.

Le pouvoir justifie la suppression de la session de septembre au nom du bon travail parlementaire…

C’est un alibi. En fait, ils sont totalement désarçonnés par la violence des extrémistes.

La course à la présidence LR est ouverte. Éric Ciotti promet le rassemblement. Cela vous rassure-t-il?

Je n’ai jamais entendu un candidat annoncer sa volonté de diviser! Mais le problème est plus complexe. En juin dernier, un choix de passivité a été imposé par ceux qui ne veulent voir aucune tête concurrente émerger avant 2027. Ce choix est suicidaire et nous avons perdu beaucoup de temps. Pour autant, la candidature d’Éric Ciotti est légitime au regard de son score à la primaire. Mais, ce qui est certain, c’est qu’il devra rassurer sur l’étanchéité vitale par rapport à l’extrême droite. Il devra être très clair, aussi bien face à Zemmour que face à Le Pen. C’est ce que j’avais défendu avec l’idée de la droite décomplexée, à la fois courageuse sur l’ordre républicain et les comptes publics, mais sans compromission avec l’extrême droite.

La prochaine présidentielle se dessine. On parle déjà du match Wauquiez/Bertrand. Est-ce une chance?

Cinq ans, contrairement à ce qu’on croit les lendemains de défaite, c’est une éternité.

Quelle est la principale urgence pour la droite?

Trancher. Pour faire plaisir à tout le monde, nous sommes restés dans la non-décision trop longtemps. Il est temps de faire des choix.