Emploi

La nouvelle réforme devrait déboucher sur «100.000 à 150.000» retours à l’emploi supplémentaires en 2023, selon l’exécutif.

Le Figaro - 21 novembre 2022 - Par William Plummer

Après plus d’un mois de consultations, le gouvernement dévoile enfin ses cartes sur la réforme de l’assurance-chômage. Lundi matin, lors d’une réunion à l’hôtel du Châtelet qui a duré tout juste plus d’une heure, le ministre du Travail, Olivier Dussopt a présenté à un patronat satisfait et à des syndicats très remontés les arbitrages retenus pour faire varier l’indemnisation des chômeurs en fonction de la conjoncture. Soit de renforcer la contracyclicité du régime, promise par Emmanuel Macron durant sa campagne présidentielle de 2022. Et comme les derniers échos le laissaient entendre, toutes les durées d’indemnisation en ouverture de droits diminueront de 25 % dès le 1er février 2023, avec un plancher minimal de 6 mois.

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Concrètement, un chômeur qui aurait eu droit par exemple à 24 mois d’indemnisation dans le système actuel - soit la borne maximale pour une personne de moins de 53 ans - n’aura plus droit qu’à 18 mois d’aide dès le début de l’année prochaine si le taux de chômage se maintient en dessous de 9 %. Un mécanisme de «complément de fin de droits» permettra toutefois de mieux protéger le demandeur d’emploi en cas de retournement négatif du marché de l’emploi. En effet, si le taux de chômage dépasse la barre des 9 % où progresse de 0,8 point sur un même trimestre, alors les durées d’indemnisation reviendront au niveau actuel. Réciproquement, si le chômage repasse en dessous des 9 % - pendant trois trimestres d’affilée cette fois -, les durées d’indemnisation seront de nouveaux réduites de 75 %.

«La baisse du chômage et les difficultés de recrutement qui subsistent aujourd’hui justifient la modification de ces règles qu’on a souhaitées simples et lisibles», a détaillé le ministre du Travail, Olivier Dussopt, à l’issue de la réunion. Alors que le flou subsistait encore sur certains points, la réforme ne sera finalement pas territorialisée. L’échelon régional n’était aux yeux de l’exécutif pas pertinent et une mise en œuvre au niveau du bassin d’emploi aurait, elle, été «trop compliquée». Par ailleurs, la réforme ne s’appliquera pas dans les territoires d’outre-mer et ne concernera pas les intermittents du spectacle, les marins-pêcheurs, les dockers et les expatriés. Reste qu’avec ces nouvelles règles, le gouvernement espère entre «100.000 et 150.000 retours à l’emploi supplémentaires à l’échelle de l’année 2023», a précisé le ministre.

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«On garde l’un des systèmes les plus généreux d’Europe. Dans bien des pays la durée d’indemnisation est moins importante qu’en France. On peut citer l’Allemagne, le Portugal, l’Italie, ou encore le Royaume», s’est défendu Olivier Dussopt. Avec cette réforme, l’exécutif compte inciter plus fortement les chômeurs à reprendre un poste. Les statistiques montrent en effet que le taux de retour à l’emploi est particulièrement fort dans les quatre premiers mois de l’indemnisation et les six mois avant la fin de droits. «Notre objectif était de rapprocher ces deux périodes», a expliqué le ministre.

La possibilité d’aller plus loin

Si le Medef, par la voix d’Hubert Mongon, voit dans cette réforme un mécanisme qui va «dans le bon sens», la musique est bien différente du côté des syndicats. Du côté de Force Ouvrière, on déplore «une rupture du contrat social du pays» et un acharnement sur «les plus précaires». «Il ne va pas faire bon être chômeur en 2023. Et on a bien compris que si la situation du chômage s’améliore dans le futur, le gouvernement n’hésitera pas à poursuivre cette diminution de la durée d’indemnisation», a indiqué le monsieur emploi du syndicat, Michel Beaugas. Et à juste titre, le ministre du Travail a évoqué à demi-mot la possibilité d’aller jusqu’à une diminution de 40 % de la durée de l’aide au retour à l’emploi (ARE) en cas de taux de chômage avoisinant les 5 %.

La CGT estime quant à elle que cette réforme porte un véritable coup de massue pour les seniors «qui perdront jusqu’à 9 mois d’indemnisation» et «seront plus rapidement exposés et concernés par les minima sociaux», a expliqué Denis Gravouil, responsable chômage de la structure syndicale. «Cette réforme a un but économique et rien d’autre. Les demandeurs d’emploi ne sont vus que comme une ligne budgétaire», déplore Eric Courpotin, de la CFTC.