Finances Publiques
Lettre ouverte au Premier ministre
L'Opinion - 12 janvier 2025 - Par David Lisnard* et Jacques Garello**
BUDGET 2025 François Bayrou a la responsabilité de rendre la fiscalité plus compétitive
Monsieur le Premier ministre, À deux jours de votre déclaration de politique générale, le moment est décisif pour définir les orientations susceptibles de répondre aux défis économiques et sociaux du pays.
Alors que le discours attendu mardi suscite de nombreuses attentes, il est crucial de proposer une voie innovante et audacieuse pour surmonter les difficultés budgétaires actuelles.
L’objectif ambitieux de maintenir le déficit de l’État entre 5 et 5,5 % du PIB afin de rassurer nos partenaires européens et internationaux est nécessaire, mais ne peut être atteint par la vieille recette éculée et pernicieuse d’une nouvelle hausse de la fiscalité.
La réalité de la situation économique et budgétaire à laquelle vous devez faire face est le fruit d’un social-étatisme que nous subissons depuis plus de quarante ans et de la dangereuse facilité démagogique du « quoi qu’il en coûte » voulu par le président de la République, qui a fait bondir la dette de 38 % entre 2019 et 2024 quand le PIB ne progressait que de 20 % sur la même période.
Or, dans la lignée de ce que firent tant de vos prédécesseurs, nous craignons que votre gouvernement mise principalement sur une augmentation des impôts pour atténuer les déficits sans s’attaquer véritablement et structurellement aux dépenses publiques qui culminent à 57 % du PIB.
Pourtant, chercher à accroître durablement les recettes fiscales en prétextant ne viser que les grandes entreprises et les grandes fortunes ne fera que porter atteinte à notre compétitivité. Ce serait compromettre la croissance économique, pourtant déjà prévue en recul en 2025, avec un faible taux de 0,8 %.
Les mêmes causes produisant les mêmes effets, le conformisme techno-fiscal des hauts fonctionnaires de Bercy conduira inévitablement à vérifier la loi économique de Laffer qui veut que « trop d’impôt tue l’impôt ».
Notre pays détient le record des prélèvements obligatoires, avec un taux de 46 % du PIB, cependant que les recettes fiscales n’ont pas été aussi importantes que prévu en 2023.
Trop de Français qui travaillent, épargnent et entreprennent, constatent en effet que leur activité n’est pas rémunérée à sa juste valeur. Ils modifient en conséquence leur comportement et pratiquent l’évasion fiscale sous plusieurs formes : vers l’étranger pour de nombreux entrepreneurs et jeunes diplômés, vers les loisirs, vers le travail domestique et les activités dont le temps n’est pas fiscalisé, et vers la fraude.
Le résultat est inéluctable : baisse de la croissance, donc baisse de l’assiette fiscale, donc baisse des recettes fiscales.
La fiscalité immobilière illustre ces travers. Les droits de mutation découragent la fluidité du marché. Plus globalement, le niveau des impôts de production fragilise les entreprises et le nombre de taux de TVA augmente les risques de fraudes.
Il est urgent de rendre notre fiscalité plus simple, plus juste et plus compétitive en la couplant à une réduction structurelle de la dépense publique pour enfin offrir un cadre propice à la croissance, à l’investissement et à l’emploi.
Le temps des demi-mesures est passé. La courbe de BAR a depuis longtemps démontré les effets délétères d’un excès de dépenses publiques sur la croissance. Ce seuil est aujourd’hui largement dépassé.
Il est temps de réduire le périmètre de l’État, de rationaliser les dépenses sociales qui représentent 33 % du PIB, d’instaurer la retraite par capitalisation, de couper dans les 80 milliards d’euros annuels de dépenses liées aux 438 opérateurs de l’État, dans les 15 milliards d’aides publiques au développement, dans les 150 milliards d’aides publiques aux entreprises, etc. Les solutions existent. Ne manque que le courage de les mettre en oeuvre pour doter la France d’un budget responsable et équitable afin de relever les défis économiques et sociaux des prochains mois.
*David Lisnard est maire de Cannes et président de Nouvelle Énergie.
**Jacques Garello est professeur émérite à l’université Aix-Marseille et président de
l’Association pour la liberté économique et le progrès social.
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