Nouvelles Technologies

Les annonces fracassantes, dont celles de constructions de gigantesques data centers, pleuvent depuis jeudi. Elles devraient continuer jusqu’à la clôture du sommet mardi.

Le Figaro - 9 février 2025 - Par Chloé Woitier et Lucas Mediavilla

Ce n’était pas prévu au programme originel, mais l’occasion était trop belle. La troisième édition du sommet sur l’intelligence artificielle, organisée à Paris après Londres et Séoul, est en train de muer en mini-sommet Choose France. Depuis jeudi, les annonces d’investissements colossaux dans le pays, se chiffrant en dizaines de milliards d’euros, se multiplient. Dimanche soir, Ie président français Emmanuel Macron, lors d’une interview spéciale sur France 2, a annoncé des investissements en France de «109 milliards d’euros dans les prochaines années». «C’est l’équivalent pour la France de ce que les États-Unis ont annoncé avec Stargate (500 milliards de dollars, NDLR). C’est le même rapport», a-t-il ajouté.

Il faut s’attendre à d’autres annonces d’ici la clôture du sommet, mardi soir. Emmanuel Macron doit notamment s’entretenir lundi après-midi avec des investisseurs internationaux. Les Émirats arabes unis ont ouvert le bal jeudi soir. Via MGX, la branche technologique du fonds souverain émirien, de 30 milliards à 50 milliards d’euros vont être investis dans la construction en France (le lieu est encore inconnu) d’un gigantesque centre de données exclusivement dédié à cette technologie. Sa puissance envisagée, de 1 gigawatt, est celle d’un réacteur nucléaire.

Les data centers sont l’indispensable moteur de la révolution IA : ils servent à entraîner ces grands modèles, puis à les faire fonctionner au prix d’une très forte consommation d’électricité et d’eau. La présence de ces infrastructures devient un enjeu de puissance et de souveraineté entre États. Le projet américain Stargate, qui bénéficiera exclusivement à l’entreprise OpenAI (ChatGPT), en est illustration : son budget de 100 milliards à 500 milliards de dollars servira à la construction de ces data centers aux États-Unis.

Investissements français

Grâce à son parc nucléaire, la France estime être en parfaite position pour accueillir ces gloutons énergétiques. L’État a même travaillé avec EDF et RTE pour proposer aux acteurs privés trente-cinq sites « clé en main », dont la carte sera présentée lors du sommet, mêlant foncier, raccordement au réseau électrique et autorisations. De quoi raccourcir de plusieurs années les délais de construction.

La France bénéficie d’excellentes compétences d’ingénierie pour ce type d’installation.
C’est aujourd’hui le pays le plus attractif en Europe pour accueillir ces infrastructures

Sikander Rashid, directeur Europe de Brookfield

Le gérant d’actif canadien Brookfield, propriétaire du leader européen des centres de données Data4, a pris la balle au bond. Il annonce au Figaro investir 20 milliards d’euros en France d’ici à 2030, dont 15 milliards seront dédiés à la construction de data centers. D’après La Tribune, la ville de Cambrai devrait accueillir le projet. « La France bénéficie d’excellentes compétences d’ingénierie pour ce type d’installation. C’est aujourd’hui le pays le plus attractif en Europe pour accueillir ces infrastructures », explique Sikander Rashid, directeur Europe de Brookfield.

Ces investissements sont aussi français. Le groupe Iliad (Free, Scaleway, Kyutai) a annoncé vendredi consacrer 3 milliards d’euros à l’IA, avec pour but affiché de renforcer la puissance de ses data centers européens. Mistral, la start-up française qui vient de lancer son assistant Le Chat sur smartphone, a annoncé dimanche soir la construction en Essonne de son premier centre de données dédié à l’intelligence artificielle en France pour «plusieurs milliards d’euros» sans en préciser le montant exact. Quant à la banque publique Bpifrance, elle a dévoilé le même jour débloquer 10 milliards d’euros qui, d’ici à 2029, seront investis de manière directe ou indirecte dans des entreprises de l’IA (start-up, constructeurs de data centers ou de composants, etc.) ou dans des fonds spécialisés.