Sécurité
Alors que des bandes peuvent s’affronter en plein jour dans les rues de nos villes, que près de la moitié des peines prononcées ne sont pas appliquées, Libres ! a décidé d’organiser un colloque, le 17 octobre dernier, pour établir les grandes lignes d’une politique pénale et pénitentiaire efficaces en invitant des spécialistes et des grands témoins.
Comme mouvement d’idées et force de proposition dans le débat public, Libres ! a voulu réfléchir sans tabous aux raisons des failles du système actuel.
A l’entrée du colloque, Patrick Stefanini, ancien préfet et conseiller d’Etat, qui animait les échanges, a d’abord posé le constat d’un triple échec. En premier lieu, l’échec de l’application des peines, à l’origine d’un sentiment d’impunité, puisque la sanction ne dissuade pas, ne punit pas, ne répare pas. Aujourd’hui, 12 000 personnes condamnées ne purgent pas leur peine et sont dans la nature. L’échec de l’application des peines tient également à la recherche, à tout prix, d’alternatives à la prison. Mais le bracelet électronique ne marche pas ! Souvenons nous que l’assassin du père Hamel en portait un au moment de perpétrer son crime ! Tous les intervenants ont reconnu également l’échec de la gestion du parc pénitentiaire : les prisons françaises sont les plus vieilles d’Europe, les maisons d’arrêt sont surpeuplées. De quoi créer encore plus d’insécurité, et faire de la prison une « école du crime ». Particulièrement quand on enferme ensemble des profils très différents, s’exposant à ce que des délinquants se radicalisent et deviennent avec le temps des apprentis-djihadistes. Enfin, il faut reconnaître également l’échec des stratégies actuelles de réinsertion, puisque plus de 60% des personnes qui sortent de prison sont condamnées à nouveau dans les 5 ans.
La première table ronde a permis de faire le point sur la politique pénale aujourd’hui, et ses évolutions prévues. François Faletti, ancien procureur général, comme Thibault de Montbrial, avocat spécialiste de la sécurité intérieure, ont manifesté les failles actuelles d’un système dans lequel il y a encore trop d’angles morts. Aujourd’hui, en France, des bandes sévissent dans des quartiers, qu’on appelle pudiquement « quartiers prioritaires », sans que la société puisse être assurée que les coupables seront suffisamment sanctionnés pour leur passer l’envie de recommencer. Et surtout, sans être sûrs que les peines prononcées seront vraiment effectuées. Chacun avec sa spécialité, les invités sont intervenus sur des propositions portées par un groupe de travail Libres ! Comme celle d’abaisser la pleine responsabilité pénale à 16 ans, sauf exception motivée par le juge. Pour éviter que les bandes ne recrutent des jeunes en comptant sur la clémence du système. Ou la proposition de rendre exemplaires les peines encourues pour des délits commis contre des personnes dépositaires de l’autorité de l’Etat sans attendre qu’il y ait des crimes !
Libres ! a soumis aux participants une proposition particulièrement originale, celle de créer une circonstance aggravante pour les crimes commis dans des zones qui connaissent déjà un taux de délinquance et de criminalité deux fois plus élevé que la moyenne nationale. Ces zones seraient définies par arrêté du premier ministre et révisables chaque année ; dans ces « Zones de Rétablissement de l’Ordre », les délits et les crimes seraient sanctionnées de peines plus sévères que les peines de droit commun au nom du droit de tous les Français à vivre en sécurité. Cette mesure s’inspire du projet de loi porté par le gouvernement centriste du Danemark, baptisé « pour un Danemark sans sociétés parallèles », qui veut combattre la création de ghettos, ces poches de misère autour de nos villes. Nous voulons nous aussi lutter contre les petits renoncements coupables, et rétablir l’ordre durablement dans tous les territoires de la République. Nous savons que cette proposition dérange, mais Libres ! l’assume ? Parce que nous voulons la République soit partout chez elle, que tous les Français puissent vivre en paix et en sécurité.
La deuxième table ronde portait sur la politique pénitentiaire. Libres ! s’est prononcé, entre autres mesures, pour le renvoi des détenus étrangers dans leurs pays d’origine, pour qu’ils y purgent tout ou une partie de leur peine : il s’agit de 15 000 détenus étrangers, soit plus d’un détenu sur cinq en France ! Prenant acte de l’état des établissements pénitentiaires français, et plus particulièrement des maisons d’arrêt, Libres ! propose de créer 12 000 places de prisons supplémentaires. Mais il ne s’agit plus de construire un seul type d’établissement, qui accueillerait tous les profils. Mais bien de différencier les établissements pour peine : des établissements spécialisés pour les mineurs avec un projet éducatif fort, pour mettre fin aux quartiers pour mineurs dans les prisons ; un encellulement individuel dans des prisons à très haute sécurité pour les détenus radicalisés, les personnes condamnées pour faits de terrorisme et les détenus particulièrement dangereux ; des centres à sécurité adaptée, plus rapides à bâtir, pour accueillir les primo-condamnés ; des centres dédiés pour les détenus en fin de peine, tournés vers la formation et la réinsertion ; enfin, des prisons médicalisées adossées à des hôpitaux pour les détenus qui souffrent de pathologies psychiatriques. Des idées éclairées, discutées et approfondies par des experts comme Gilles Fonrouge, actuel président des Cours d'assises de la Haute-Vienne, de la Corrèze et de la Creuse, ou Pierre-Olivier Sur, avocat pénaliste, ancien bâtonnier de Paris.
« Libres ! » propose donc de doter la France d’une nouvelle politique pénale et pénitentiaire. Avec l’exigence que l’Etat remette la priorité sur ses missions régaliennes : la sécurité, la justice, la défense. En 1965, l’Etat leur consacrait 6,5 % du PIB alors qu’aujourd’hui c’est 3,2 % ! Réduire les déficits, oui, mais pas au prix de la sécurité des Français ! Si la sécurité est bien la première des libertés, il est urgent que l’Etat s’engage à mieux protéger la société. Le défi, c’est aujourd’hui de faire marcher notre politique de sécurité sur ses deux jambes : la police et la justice, l’arrestation et la sanction. Et pourtant, malgré ce que nous vivons en ce moment, la réforme examinée à l’Assemblée cet automne ne veut pas d’une politique pénale plus ferme, ne veut pas de plus de places de prison. Pourtant, aucune stratégie pour les prisons ne pourra réussir si, en amont, on ne se dote pas d’une véritable politique pénale, dissuasive pour les caïds et les criminels, protectrice des Français et de leur sécurité sur tout le territoire.
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