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Tribune
La non-censure n’est pas seulement un geste responsable. Elle peut être le point de départ du renouveau.
Le journal.info - 5 février 2025 - Par Laurent Joffrin
Officiellement, c’est une abstention exceptionnelle. Jugeant nécessaire l’adoption d’un budget pour le pays, refusant de déclencher une nouvelle crise dommageable à l’économie, les socialistes ont refusé de renverser le gouvernement, tout en restant dans l’opposition. Mais l’essentiel n’est pas là : ils se sont surtout émancipés de l’influence délétère de la France Insoumise.
Celle-ci ne s’y est pas trompée : le PS, dit-elle, a « interrompu le Nouveau Front Populaire ». Elle a beau se répandre en imprécations, c’est une excellente nouvelle pour la gauche. Tenu en laisse par Jean-Luc Mélenchon, le NFP n’arrivait à rien. En trois ans d’existence, il n’a pas fait gagner une voix à la coalition. Son programme, élaboré sous la férule insoumise, était caduc dès sa naissance. Qui peut croire qu’on pouvait impunément prévoir plus de 100 milliards de dépenses supplémentaires, revenir à la retraite à 60 ans, rompre avec les règles européennes ? Qui pouvait croire, surtout, que l’union pouvait survivre aux menaces, au chantage et aux insultes émises en permanence par la France insoumise, qui est devenue un repoussoir pour une grande partie des électeurs, y compris à gauche, comme le montre encore le scrutin municipal de Villeneuve Saint-Georges ?
Il était plus que temps de remettre tout cela à plat. Et donc de commencer par le commencement : proclamer l’autonomie des socialistes, renforcer le pôle réformiste sans lequel il n’y a aucune victoire possible, le doter d’une organisation rénovée, réunifiée et d’un projet de transformation sociale qui tienne compte des réalités nouvelles, géopolitiques, technologiques et financières. Alors seulement il sera possible de réenvisager l’union de la gauche, autour d’un programme renégocié, et d’un comportement exempt de tout sectarisme, de toute tactique d’intimidation et de toute complaisance envers l’antisémitisme.
Dans l’immédiat, la rupture du NFP ne présente aucun danger : LFI a, de toutes manières, décidé de concourir contre les socialistes aux prochaines municipales et de présenter la candidature de Jean-Luc Mélenchon à la présidentielle, ce qui contraint le PS à avoir la sienne. Inutile de quémander un quelconque arrangement sur ces deux points : LFI a déjà choisi de faire cavalier seul. L’urgence de l’heure est donc simple et claire : un projet solide et audacieux ; la préparation d’une candidature réformiste pour 2027. Tout le reste n’est que rhétorique vaine et perte de temps.
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