Tribune
Contrairement à ce qu’affirment certains membres du gouvernement et le président de la Cour des comptes, il est impossible, même si la France ne vote pas son budget, que les fonctionnaires ou les intérêts de notre dette ne soient plus payés, explique la présidente du groupe RN à l’Assemblée nationale.
Le Figaro - 26 novembre 2024 - Par Marine Le Pen
En sept ans au pouvoir, Emmanuel Macron a transformé nos comptes publics en une pyramide de Ponzi : d’un côté, des dépenses tous azimuts financées par une course à l’endettement, sans aucune vision politique ; de l’autre, des recettes qui ne sont jamais venues, faute de stimulation réelle de la production française. Au bout du chemin, 3 230 milliards de dette, et une France qui emprunte désormais aux mêmes conditions que la Grèce ou l’Espagne. C’est à Michel Barnier que le président de la République a opportunément confié la lourde tâche de solder l’héritage de son septennat de gabegie.
Consciente de la crise sans précédent de nos finances publiques, j’ai exposé avec clarté, dès le mois de septembre, nos lignes rouges budgétaires : préservation du pouvoir d’achat des classes populaires et moyennes ; réalisation d’économies de structure sur le train de vie de l’État et l’immigration ; protection des entreprises, alors que le retournement économique en cours se traduit chaque semaine par l’annonce de plans sociaux. Il existait pour cela un scénario d’équilibre, permettant en outre d’accélérer le redressement des comptes publics en proposant plus d’économies et moins d’impôts : nous l’avons documenté, ligne à ligne, dans notre contre-budget présenté par Jean-Philippe Tanguy.
Je constate qu’à ce jour, cette démarche responsable n’a été suivie d’aucun effet. Les députés du « socle commun » ont boycotté le débat budgétaire ; le premier ministre lui-même a été aux abonnés absents ; aucune de nos mesures n’a été, même hypothétiquement, inscrite dans la proposition budgétaire du gouvernement. Et c’est nous qui serions, en refusant ce budget de récession et de punition, les « artisans du chaos » ? Tout cela n’est pas sérieux.
Premièrement, au risque de rappeler une vérité élémentaire, l’objet même du vote d’un budget est l’expression démocratique d’un projet politique. « Tout mandat impératif est nul », dispose notre Constitution en son article 27. Nos onze millions d’électeurs, n’en déplaise au gouvernement, ont exprimé un choix clair en matière fiscale, sécuritaire et migratoire. Le simple fait de nous sentir liés par la parole donnée constituerait donc un acte de subversion ? En ce cas, autant renoncer au vote du budget, puisqu’il serait impossible de le refuser. Ce serait une intéressante conception de la démocratie.
Nous ne laisserons pas le Rassemblement national devenir le bouc émissaire de l’impéritie de gouvernants inaptes au débat et au compromis.
Marine Le Pen
Deuxièmement, il n’existe dans nos institutions aucun risque de « shutdown » (c’est-à-dire l’arrêt du paiement des fonctionnaires ou des intérêts de notre dette), contrairement à ce qu’affirment à l’unisson certains membres du gouvernement voire le président de la Cour des comptes lui-même. Même en cas de censure, l’impôt serait levé, les fonctionnaires payés, les pensions versées, et les soins médicaux remboursés. Il suffirait pour cela au gouvernement censuré de voter, au titre des affaires courantes, une loi spéciale permettant a minima la reconduction du budget 2024, dans l’attente d’un nouveau gouvernement et d’une loi de finances formelle. Ce serait bien sûr un pis-aller, compte tenu des faiblesses du budget 2024 ; mais cela permettrait au moins d’éviter aux entreprises et aux ménages les 40 milliards d’impôts supplémentaires prévus dans le budget initial de Michel Barnier pour 2025 – dont 20 milliards pèseraient directement sur nos entreprises, soit l’équivalent de 400 000 emplois.
Nos textes, constitutionnel et organiques, prévoient tout cela – grâce à leurs rédacteurs, à commencer par Michel Debré et Charles de Gaulle. Les Français ont déjà subi les mensonges du gouvernement sur l’état de nos finances tout au long de la campagne des élections européennes, puis législatives. Quitte, pour cela, à désinformer en agitant des risques politiques inexistants, ce qui a entraîné une envolée des taux et fait perdre plusieurs centaines de millions d’euros à l’État. Après avoir été accusés de populisme lorsque nous réclamions un audit des finances publiques – d’ailleurs immédiatement diligenté par Michel Barnier lors de son arrivée à Matignon –, nous ne laisserons pas le Rassemblement national devenir le bouc émissaire de l’impéritie de gouvernants inaptes au débat et au compromis.
Le vrai risque pour la démocratie, ce n’est pas le « shutdown » : ce sont les fake news !
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